Nous partageons le témoignage de Lucie qui a subi une pré-éclampsie à 33SA compliquée d’un HELLP syndrome avec HRP et aggravation en post partum. Elle avait pourtant des signes qui auraient dû alerter le personnel médical (œdèmes, RCIU, maux de tête, maux d’estomac). Malgré le manque d’écoute aux urgences, son infirmier libéral a su bien réagir. Lucie rappelle l’importance d’insister auprès du personnel médical même si l’on sent que l’on n’est pas prise au sérieux. Cela peut prévenir de séquelles lourdes pour maman et bébé voire pire, la pré-éclampsie pouvant être très rapide ! Belle vie à Lucie et sa petite famille.
« Bonjour à vous toutes, les guerrières qui ont lutté contre la pré-éclampsie. Je tiens à témoigner pour que les mamans ou futures mamans reconnaissent le moindre signe que les soignants pourraient louper car, qui dit grossesse, dit beaucoup de petits maux qui peuvent passer inaperçus dû à cette maladie tellement sournoise. Je me présente : Lucie, 26 ans, maman d’une petite fille de 19 mois, née le 9 mai 2020 pour « sauver maman »… Mon petit bébé arc-en-ciel arrive après la perte neuf mois auparavant de mon petit ange.
Je me souviens le jour où j’ai appris ma grossesse après de longs mois d’attente, papa et moi étions tellement heureux ! Et là, tout s’enchaîne : je suis placée en grossesse surveillée car j’ai des antécédents de fausse couche. Plusieurs prises de sang, des échographies très souvent jusqu’aux fameuses 12 semaines, des moments de peur aussi… Le premier trimestre passe, bébé va bien et maman aussi, aucuns symptômes de grossesse, une merveilleuse grossesse ! Pas de nausées (courage aux mamans qui le vivent) ! Les mois passent. Papa et maman ont hâte de savoir quel secret cache bébé. Au moment du confinement, nous ne savions pas si papa pourrait assister à l’échographie d’annonce du sexe ou même à l’accouchement… L’échographie T2 arrive. Je vois que la sage-femme prend du temps, s’arrête beaucoup, a l’air inquiète. Même à travers le masque, nous le voyons… Je m’inquiète, je lui demande à plusieurs reprises ce qui ce passe. Elle me demande de patienter, qu’elle regarde, pour me dire par la suite : « Je vérifie car bébé est petite, en-dessous de la courbe, ce sera un petit gabarit. Je souhaiterai vous faire dans un mois une échographie de contrôle. » Le choc. Je ne comprends pas. Avec tout le poids que j’ai pris, je me dis que ce n’est pas possible…
Nous avons appris par la suite que bébé avait du mal à grossir à cause de la pré-éclampsie précoce mais que personne n’a diagnostiquée…
Elle nous annonce donc que c’est une fille ! Papa et maman sont heureux ! Nous avons déjà le prénom. Nous t’attendons mais prends ton temps, il est encore tôt.
Les semaines qui suivent avant cette échographie de contrôle, je me sens bizarre… Je vois trouble, j’ai souvent très mal à la tête et à l’estomac mais je me dis que c’est la grossesse et que j’en parlerai à ma prochaine visite. Je commence à avoir des protéines dans les urines mais ma sage-femme me dit que mes taux sont normaux donc je ne m’inquiète pas. La fameuse échographie de contrôle arrive. Bébé avait pris le dessus, elle reprenait du poids. Cela restait un petit bébé mais elle allait bien donc j’oubliais mes maux et j’étais contente de le dire au papa. De retour à la maison, mes maux sont revenus. J’étais obligée de trouver une pharmacie de garde tellement mon estomac me brûlait. On me donne du Gaviscon®… Cela ne passe pas… Je me rends aux urgences (le 30 avril), je leur explique ce que je ressens car il faut savoir qu’à cause du Covid on a annulé tous mes rdv sage-femme et qu’on me les faisait au téléphone donc pas de prise de tension ou de contrôle… On me dit que j’ai pris un peu de poids et que je dois faire attention à ce que je mange et ils me laissent partir malgré ce que je leur ai dit…
Le 7 mai, mon infirmier libéral vient à la maison. Il me trouve pâle et me prend la tension : je suis à 21 ! Le choc ! Il m’envoie aux urgences ! S’en suivent des vomissements. J’ai cru tomber. Mon mari rentre vite du travail pour m’y amener. Je suis à presque 33SA.
Arrivée aux urgences, je comprends vite qu’ils veulent me garder. Ma tension ne descend pas, la bandelette protéines est positive de suite…
Ils m’hospitalisent en me disant que je vais accoucher dans le week-end sans m’expliquer pourquoi. On me monte en chambre avec un traitement pour la tension et une piqûre pour maturer les tout petits poumons de ma fille, encore si petite.
Deux jours passent. Mon état s’empire, je suis en train de faire une forme sévère avec un HELLP syndrome, mes plaquettes de sang descendent. Je suis en train de m’empoisonner, mon foie et mes reins ne veulent plus fonctionner. Je continue de gonfler et ma tension ne descend pas.
Le 9 mai au matin, ils décident de me déclencher par tampon hormonal.
À 16h00, les contractions arrivent mais mon état se dégrade. Dilatée à 4, ils décident de m’amener en salle d’accouchement, me posent la péridurale et on attend… Mon état s’empire encore…
20h00 : on perce la poche des eaux et on attend…
21h00 : je les appelle car je sens quelque chose couler. Est-ce normal ? On me répond : « Vous saignez abondamment, j’appelle le gynécologue ! »
Le gynécologue arrive et annonce un code orange avec césarienne en urgence et là, tout défile… Je ne comprends pas. On me retire des bras de mon mari, on me déshabille, me rajoute de l’anesthésiant. J’entends : « On ouvre ! «
Je me sens partir… Je le dis à l’anesthésiste. On me donne de l’oxygène. Mon cœur s’emballe…
Ils avaient attendu trop longtemps, j’étais en train de me vider de mon sang à cause d’un hématome rétro placentaire. Je voyais les culots de sang défiler. Ma fille naît à 22h52. Je l’entends pleurer. Ils me la montrent et me disent : « Une vraie guerrière, elle respire seule. » Je suis heureuse. Et là, trou noir… Je ne me souviens plus. Je me réveille, mon mari, au-dessus de moi en train de pleurer, qui me dit que ma fille est magnifique et qu’il ne peut pas rester Covid oblige… Et la pire nuit de ma vie commence. Mes reins ne fonctionnent plus, je n’arrive pas à uriner, je gonfle de plus en plus. On me demande si j’ai envie de faire pipi, je dis non à plusieurs reprises. On me remet un anesthésiant pour retirer mon pansement, on me fait des échographies. Ils ne comprennent pas, ils ont peur… Plusieurs prises de sang montrent que mes plaquettes descendent, je suis à 61 000 au lieu de 150 000 au minimum.
Je deviens blanche, à la limite du transparent, je me sens mourir et j’essaye de me battre mais il est impossible de lutter et je perds connaissance à plusieurs reprises… C’est tellement difficile, mon corps m’emmène… Mon mari reste sans nouvelles. Il me raconta par la suite que c’est lui qui a dû appeler l’hôpital pour savoir tout cela et qu’il est tombé de haut… 10h00 du matin, une infirmière réanimation arrive et dit : « Enfin ! Enfin, elle urine ! » Et là, je revis, je me sens dégonfler petit à petit. Je me suis battue, j’ai vaincu ! 15 jours d’hospitalisation ont été nécessaires pour que tout se remette en ordre, un mois pour ma fille qui fut une guerrière ! Ne doutez pas de vous si vous sentez quelque chose, insistez ! C’est quelque chose que je n’ai pas fait et on ne me croyait pas toujours. Je tiens quand même à remercier certains membres du personnel de l’hôpital – qui n’est pas très réputé ici – mais ils sont restés près de moi tout de même !
Mais si vraiment vous voyez que quelque chose n’est pas normal, foncez car cette maladie ne prévient pas ! Elle est sournoise, rapide et dangereuse ! Pour vous comme pour bébé !
Emy est née à 33SA pile, le 9 mai 2020 à 22h52 pour sauver maman qui était en train de mourir, l’emportant avec elle !
Courage à toutes les mamans ! »