Eclampsie post-partum et retard de diagnostic (Marina)

Marina a fait une éclampsie tout juste après son accouchement. L’éclampsie (crise convulsive) est une complication de la pré-éclampsie lorsque celle-ci ne peut pas être prise à temps ou n’est pas diagnostiquée… Marina avait une tension très élevée malgré les traitements en urgence et une forte protéinurie et a pu être sauvée de justesse. La pré-éclampsie peut être fulgurante et il est vital de connaître les signes précurseurs pour réagir vite. Nous souhaitons à Marina de pouvoir récupérer de cette épreuve.

« Je suis Marina, j’ai 27 ans et je suis infirmière. Je suis tombée enceinte de ma fille en juillet 2019. Date du terme prévue le 24 avril 2020. Ma grossesse s’est dans l’ensemble bien passée, hormis un arrêt forcé à 22SA pour cause de menace d’accouchement prématuré suite à un raccourcissement de mon col et je faisais également des échographies de contrôle pour la croissance de ma fille, environ tous les mois car elle était toujours en bas des courbes de poids et de taille. J’ai été au repos total jusqu’à ma césarienne d’urgence le 19 mars 2020 aux alentours de 36SA (pré-éclampsie non diagnostiquée).

Le 18 mars, je me suis réveillée avec une gêne au niveau de l’œil. Je suis allée me regarder dans le miroir, et là j’ai vu mon visage œdématié…j’étais méconnaissable. Le réflexe a été pour moi d’aller contrôler ma tension (heureusement j’ai un tensiomètre chez moi) . En effet, je connaissais un peu la pré-éclampsie car ma sœur en avait fait une pour son aîné. Ma tension était à 17/11 et habituellement je suis autour de 10… J’ai de suite appelé ma maternité qui m’a dit de venir faire un contrôle. La tension ne diminuait pas. Ils ont décidé de me garder en observation et sans le savoir, cette décision nous a sauvé la vie. Malgré les traitements, ma tension ne baissait pas. J’ai eu un tas d’examens (monitoring, prise de sang et protéinurie sur 24h).

Le lendemain, le 19 mars, la sage-femme me dit que ma tension ne baisse pas et qu’ils feront la césarienne cet après-midi. Elle me fait au même moment l’injection intramusculaire pour maturer les poumons de ma fille car je ne l’avais pas reçue avant. Deux heures après, j’ai commencé à avoir une gêne oculaire : des tâches brillantes, des points de lumière. Je n’ai pas voulu alerter de suite mais très vite cela s’aggravait. La sage-femme a pu contrôler ma tension (18/12) et voir que mon taux de protéinurie était à 5 grammes… Le temps qu’elle avertisse le gynécologue de garde, qu’elle revienne et qu’elle avertisse mon conjoint, j’étais devenue totalement aveugle… J’ai gardé mon calme – je ne sais comment…peut-être que je ne soupçonnais pas une seule seconde ce qui était en train de se passer et la gravité de la situation. Une autre sage-femme est venue et m’a descendue au bloc. Je n’ai que de vagues souvenirs car j’ai très vite perdu connaissance pendant ma césarienne mais je me souviens des ressentis de la douleur « physique » : la piqûre de la rachianesthésie et lorsque le gynécologue m’appuyait sur le ventre. J’ai senti cela mais je n’étais pas consciente de ce qui se passait. Et je ne sais comment cela est possible mais j’ai entendu une personne dire : « Elle est là » et là j’ai tout de suite pensé à ma fille et j’ai attendu qu’elle pleure. J’ai ressenti un énorme soulagement et j’étais pleinement consciente de cela par contre. Ma fille était là, en bonne santé. Je me suis dit en une fraction de seconde : « elle est là, peu importe ce qui se passe, elle va bien. » Pourquoi cette pensée ? Je sentais les choses arriver ?… Ensuite, je ne me souviens de rien. Je me suis réveillée en réanimation et intubée, j’avais été placée dans le coma dans un autre hôpital loin de mon bébé…

À mon retour, j’ai parlé avec une des sages-femmes qui m’a tout expliqué. Je suis montée aux alentours de 20 de tension au bloc. Après qu’ils aient sorti ma fille, j’ai fait une crise convulsive : une éclampsie. Lors de mon passage en réanimation, j’ai également appris que j’avais aussi fait une encéphalite réversible postérieure qui serait aussi une complication rare de l’éclampsie. J’ai retrouvé mon bébé trois jours après. Malgré ma faible condition physique, je me forçais à aller bien, je ne voulais pas être séparée de ma fille une seconde de plus, tout ceci pendant le confinement qui a rajouté des difficultés. Mon conjoint a pu voir notre fille qui avait été placée en néonatalogie et avait un libre accès jour et nuit. Puis une fois que je suis revenue, j’ai pu la récupérer auprès de moi et mon conjoint ne nous a plus revues durant une semaine car les visites étaient interdites…

Aujourd’hui ma fille va bien, et n’a aucune séquelle. L’équipe médicale nous a réellement sauvé la vie. Sans eux, nous ne serions plus de ce monde ou alors je n’ose imaginer dans quel état. La récupération pour moi a été un peu plus longue : la tension s’est rapidement stabilisée mais j’avais beaucoup de tachycardies et j’étais essoufflée rien qu’en marchant. 18 mois après, je vais mieux même si l’effort reste encore un peu difficile pour moi.

Merci d’avoir pris le temps de me lire. Il est important que l’on sache qu’un accouchement n’est pas anodin et que l’on peut dans le pire scénario perdre la vie ou celle de son bébé… Et je laisse un petit message aux femmes enceintes qui me liraient : prenez soin de vous et surtout, écoutez-vous. »

Partagez cet article !

Laisser un commentaire