« J’ai avancé, pour mon fils, prématuré, à vitesse grand V pour être forte »

Stéphanie partage avec nous aujourd’hui son témoignage qui nous montre les différentes émotions par lesquelles nous passons avant, pendant et après la pré-éclampsie notamment à l’annonce, quand on ne sait pas forcément ce que c’est…

« Nous sommes le 4 mai 2017. Mon test de grossesse est positif ce coup-ci. Je suis émue, heureuse, enfin tous mes sentiments se confondent… Mais à partir de ce jour, des saignements se multiplient. Après de nombreux examens, on me parle d’un décollement. Au fond de moi, j’étais convaincue que j’allais perdre mon bébé. C’était trop beau que tout se passe bien pour une première grossesse, la chance est rarement avec moi… Les semaines passent, le décollement se résorbe. Bébé évolue bien, ma prise de poids est correcte. On sait que c’est un garçon, qu’il est prévu pour début janvier, tout va bien…

Mais en octobre, après un retour aux urgences pour saignement, je suis arrêtée car mon col est trop rétracté pour mon terme. J’ai donc du temps pour confectionner, penser, commencer mes cours de préparation à l’accouchement. J’écris mon projet de naissance où je souhaitais de la musique, du peau à peau, une mise au sein …. Mais lors de l’examen suivant, ma gynécologue s’affole. Mon poids a considérablement bougé, mes résultats d’examens sont mauvais, ma tension est mauvaise et d’après son écran, l’artère utérine irrigue mal mon bébé qui ne fera pas plus de 2,6kg à terme . J’ai donc un suivi deux fois par semaine à la maison. J’en rigole avec la sage-femme en disant que la gynécologue s’est affolée pour rien, que la tension était dûe à l’effet blouse blanche avant ces RDV…

Mi-novembre, je demande à mon conjoint d’installer le lit, nous préparons la chambre. Je dis à tout le monde qu’à mon avis, mon bébé sera là avant Noël, pour que ce soit notre cadeau… Lundi 20 novembre, je dis à mon conjoint que je sais que c’est trop tôt mais que j’ai hâte que notre petit bout soit là. D’étranges signes commencent. Mon chat est installé toutes les nuits sur ma valise, je ronfle horriblement au point de m’en réveiller, j’ai très mal aux oreilles, j’ai les gencives gonflées et j’ai même du mal à mâcher… Une légère barre en-dessous de la poitrine de temps à autres et des difficultés à uriner. Je disais « comme une infection urinaire mais sans douleur ». Du compte gouttes…

Samedi 25 : ma gynécologue me fait hospitaliser. Ma protéinurie est trop élevée et je n’ai uriné que 400ml en 24h. Nous partons en ne prenant que ma valise, pour le temps du week-end. Pesée dès l’arrivée : j’ai pris 5 kg depuis lundi !… Prise de sang, monitoring, analyse d’urines… Dimanche 26 novembre : le gynécologue du service vient échanger avec moi et me parle de gagner des jours (à vrai dire je ne vois pas le problème, je ne comprends rien à ce qu’on me dit. Si ça doit être sans risque, autant attendre 15 jours pour me déclencher). On m’emmène visiter le service néonatalogie (je ne comprends toujours pas pourquoi, tout va bien). Je réalise un peu mais ne veux pas affronter cette possible réalité, j’ai du temps encore.. 16h00 : une sage-femme entre dans la chambre… « Votre analyse d’urines ne va pas… On vous opère dans une heure ». C’est une claque, je passe dans tous les états, la main sur le ventre pour protéger mon bébé inconsciemment… J’ai eu à peine le temps d’appeler mon conjoint, de me doucher, d’avoir eu cette piqûre douloureuse pour la maturation des poumons, de leur remettre les papiers (dans quel ordre met-on les prénoms ? On n’en n’avait pas parlé ? Avec ou sans accent ?!)… Puis la césarienne, mon bébé que l’on me colle quelques secondes contre la peau malgré mon masque… Je remonte en chambre, tout va bien, on m’apporte un fauteuil pour bientôt aller voir mon bébé… Mais je fais une hémorragie, quatre heures après l’opération. Retour au bloc, révision utérine, anesthésie générale.

Lundi 27 novembre, 6h00 du matin, je me réveille seule dans ma chambre, mon ventre si vide… Que s’est-il passé ? Où est mon bébé ? Je ne le rencontrerai qu’en fin de matinée, sans avoir vraiment l’impression que ce soit mon enfant… Je débordais pourtant de tant d’amour pour lui ! Pour la première fois, après toutes ces péripéties, j’entends le terme pré-éclampsie. J’ignorais tellement de choses….

« Nous » sommes restés 15 jours en néonatalogie. Pas de visites, loin de l’accouchement que j’imaginais et du monde merveilleux de la maternité… Pas de photos de naissance à acheter… J’ai eu l’impression de faire un deuil de ma grossesse, qu’on m’a enlevé mon enfant, je me suis longuement reproché de ne pas avoir assez bu pour éviter cette césarienne… J’ai avancé, pour mon fils, prématuré, à vitesse grand V pour être forte… Puis il a eu 1 an, et j’ai revécu toute cette journée comme ci c’était hier en m’effondrant et me demandant : « pourquoi moi, pourquoi nous ? ». J’ai mis du temps à me reconstruire, à accepter qu’on me touche, à évoquer mes possibilités lointaines de lui donner un jour un frère ou une sœur… C’est notre histoire, cela fait de nous des battants. »

Stéphanie, 27 ans, maman de Timéo, né le 26 novembre 2017 à 34SA.

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