Emeline qui avait déjà témoigné de la pré-éclampsie qu’elle avait connue pour son premier enfant, souhaite partager aujourd’hui son expérience de la « grossesse d’après ». Avec un bon suivi et le traitement adéquat, il est tout à fait possible de ne pas récidiver. Sans traitement, les risques de récidive sont de 15-20% (selon les antécédents) à ce que l’on sait à ce jour, et le traitement par aspirine nourrisson les réduit grandement ! Si récidive, elle est en général moins précoce et moins sévère. Tout notre soutien à vous toutes qui tentez de surmonter ce traumatisme !
« J’avais témoigné il y a quelques temps de ma pré-éclampsie sévère en 2016 accompagnée d’un HELLP syndrom à 33SA+5, de mon passage en réanimation, de ma transfusion, de mon bébé qui faisait 1,580kg. Un réel traumatisme comme nous sommes nombreuses à le vivre. Aujourd’hui après un long cheminement dans mon esprit, j’arrive à me dire que la vie m’a fait vivre une épreuve qui me fait voir les choses différemment. J’ai la chance d’être en vie et d’avoir mes enfants.
Fin 2019, je tombe enceinte. Le terme est prévu pour le 31 août 2020. Celui de mon fils en 2016 était normalement pour le 2 septembre 2016. La même période de grossesse… Le 1er trimestre a été un peu angoissant car j’ai eu deux belles gastro-entérites… Le papa, et même certaines personnes de mon entourage, me faisaient ressentir leur stress. Sans parler des hormones. Par chance, ma sœur a été d’un grand soutien psychologique. Mise en place de l’Aspegic® dès le test positif. À partir de la T2, une échographie par mois et à partir de 26SA, suivi à domicile par une sage-femme (tension, bandelettes, monitoring). Ma sage-femme a aussi été d’un réel soutien. Au moindre doute je la contactais. J’ai parlé de mes angoisses mais en toute honnêteté dans l’ensemble, j’ai plutôt réussi à gérer ce stress, puis vint le terme de ma pré-éclampsie… Dans ma tête, j’étais prête à accoucher…
Je vivais ma grossesse au jour le jour : « Aujourd’hui ça va, on verra demain ». Pas une seconde je n’ai imaginé une belle fin, des contractions, un départ à la maternité avec la valise. Une séance de yoga m’aura fait pleurer pendant une heure car la sage-femme m’a fait imaginer cette fin de grossesse, chose que je ne m’autorisais absolument pas. Cela m’a fait du bien, vraiment. Ah oui, j’ai le droit de connaître cela ? Le traumatisme est là, quelque part, il ne nous quitte pas.
Puis le jour du terme arrive, le 31 août à 6h00 du matin. Mes premières contractions arrivent (découverte après ma césarienne d’urgence). Jusqu’à 16h00, je les gère puis j’ai (enfin) la péridurale (bravo à celles qui ne la prennent pas !). Psychologiquement cela a été très très difficile. J’ai repris mes esprits après la péridurale. Au début, cela faisait du bien, mais le traumatisme est complètement ressorti (moi qui pensais gérer à peu près)… Je n’arrêtais pas de dire que j’allais mourir, que je ne voulais pas et que je ne voulais pas non plus perdre ma fille. Au début, le personnel soignant ne comprenait pas pourquoi je disais cela… J’avais peur, cela ne pouvait pas bien se passer, ma césarienne allait s’ouvrir ou la pré-éclampsie revenir… « Mais madame c’est rare ». Rare…cela ne veut plus rien dire pour moi, « rare » n’est pas « impossible ». Puis finalement, 1h00 du matin, ma fille est là, elle est sortie, 3,600kg, elle est avec moi, nous allons bien. Je suis transférée dans ma chambre. Elle est avec moi, je ne la quitte pas. Je n’ai pas peur, je m’en occupe. Je suis mère une deuxième fois et je le suis physiquement avec mon bébé…
C’est magnifique. Mais ce vide des premiers jours avec mon fils, je le ressens de plus en plus. Je donne ces moments à ma fille alors que je n’ai pas pu les donner à mon fils. Je culpabilise, c’est tellement difficile, ce n’est pas juste. Mais finalement j’ai donné à mon fils tout ce que j’avais, c’est différent.
Avec mon témoignage, je veux surtout montrer qu’une récidive n’est pas systématique mais que le traumatisme fait bel et bien partie de nous. Ne gardez rien pour vous, vous n’êtes pas seules. Avec le temps et le recul, je m’estime très chanceuse et mon histoire comme tant d’autres est un message d’espoir pour des mamans qui se posent la question d’un autre enfant. J’envoie toutes mes pensées à vous toutes et tous : mamans, mam’anges, papas, pap’anges… »