Pré-éclampsie sévère et précoce, manque d’informations et grossesse d’après (Cécile)

Cécile nous confie aujourd’hui son expérience d’une pré-éclampsie sévère à 6 mois de grossesse avec protéinurie, HELLP syndrome, tension très élevée qu’elle a pu mener à 31SA+5 grâce à son hospitalisation, mais se souvient du manque d’explications de la part du personnel médical… C’est seulement une semaine après son accouchement qu’elle saura vraiment ce qui s’est passé. Sa grossesse d’après s’est mieux passée grâce à un très bon suivi malgré une tension persistante avec un accouchement par césarienne programmée à 37SA. Nous souhaitons plein de bonheur à la petite famille.

« Je souhaitais faire part de mon témoignage. J’ai fait une pré-éclampsie sévère et mon fils souffrait d’un rciu sévère. Il est né par césarienne en urgence à 31SA+5 pour cause maternelle.
J’ai 22 ans quand je tombe enceinte de mon premier enfant, tout se passe bien, jusqu’à mon 6ème mois de grossesse début 2014. Visite chez mon obstétricien, qui constate que j’ai pris 8kg en peu de temps, alors que j’en avais perdu six jusque-là. Jusqu’à maintenant j’allais chez ma gynécologue, pour réponse à ma prise de poids j’ai eu : « vous avez bien profitez des fêtes de fin d’année ! » et « la balance de votre gynéco doit être mal réglée, vu la différence de poids en si peu de temps »

Quelques jours plus tard, je commence à être vraiment essoufflée en marchant, j’ai une grosse barre en dessous de la poitrine qui m’étouffe. Je ne sens presque plus mon fils bouger. Cela m’inquiète. Je trouve que mon ventre est tout dur, et j’ai des maux de tête horribles, chose que je n’ai jamais en temps normal. Mon chat, qui est plutôt solitaire, viens me coller sans cesse. Je demande rdv en urgence à une autre gynécologue, car la mienne n’est pas là (celle-ci je la connais car elle anime les cours de préparation à la naissance). Échographie, tension… Elle appelle la maternité pour que je m’y rende. Elle me demande un test urinaire pour la protéinurie. Vu le résultat sur la bandelette, c’est en ambulance que j’irai à la maternité. J’avoue que je ne comprends pas ce qu’il se passe. Elle me dit de prévenir mon mari. Je suis transférée à la maternité. Je n’ai aucune affaire sur moi, nous sommes jeudi en fin d’après-midi. Je demande à la personne qui s’occupe de moi si je vais rester longtemps hospitalisée, elle me dit « sûrement un petit moment ». On ne m’explique toujours pas ce qu’il se passe. On m’allonge sur le côté. On me donne des médicaments, je ne sais plus lesquels ni pour quoi, et je fais de la tachycardie. Monitoring fait, aucun commentaire. Samedi matin je passe une échographie, sur le commentaire de celle-ci je vois : « aucun mouvement fœtal détecté ». Je comprends que cela les inquiète, mais je n’ai aucune explication. J’ai des prises de sang, de tension, mais toujours pas d’explications sur ce qu’il se passe. Dimanche matin, on m’annonce que je dois être transférée en maternité niveau 3, car « si jamais bébé doit naître, il ne vaudrait mieux pas que vous soyez séparés »
Mais pourquoi mon bébé devrait naître maintenant ?? Je n’ai pas de contractions, mon col ne bouge pas. Je suis dans l’ignorance totale.

Le début de mon séjour, que je qualifierai d’enfer, commence maintenant, ce dimanche après-midi, à mon arrivée à l’hôpital de niveau 3. Échographie, prise de sang, tension, c’est reparti pour un tour… Je suis transférée en soins intensifs.
Tous les matins, j’ai le droit à ma douche à la Bétadine® « au cas où, on ne sait jamais… »
Finalement mardi matin je remonte en chambre normale, en surveillance, avec un « réservoir à pipi » à remplir pendant 24h. Je raccompagne mes beaux-parents, qui venaient me rendre visite avec mon mari. Remontée en chambre, je commence à aller mal, cette fameuse barre revient mais d’une force incroyable. Je hurle, je suis pliée en deux. Moi qui ne suis pas douillette, j’ai cru mourir. Mon mari sonne, hurle dans le couloir, enfin ils arrivent. Voilà le premier chiffre connu de ma tension : j’ai 22/10. J’ai l’impression de ne plus avoir possession de mon corps tellement la douleur est forte, je n’en peux plus. On m’amène en fauteuil pour me redescendre en bas, aux soins intensifs. Tout ce que je retiens de cette descente, c’est cette infirmière où je ne sais pas quel membre du personnel, qui me dit « calmez-vous madame, on ne va pas être copine ». Je pense que cela m’a bien traumatisée car je ne me souviens que de cela. D’après mon mari, ils m’ont mis une bonne dose de calmants. Je ne me souviens plus de la fin d’après-midi de ce jour. Le lendemain, ils m’annoncent que ce sera aujourd’hui, par césarienne. Je leur demande pourquoi je ne peux pas accoucher par déclenchement. Apparemment mes plaquettes sont en train de chuter, et j’ai des enzymes dans le foie. Je bois beaucoup, mais rien ne sort. J’ai des œdèmes de partout, les infirmières n’arrivent plus à me piquer, les perfusions ne passent plus. Maintenant, j’ai une peur phobique des prises de sang, j’ai peur qu’on me loupe, qu’on me pique et repique… J’ai plus de 4 grammes de protéinurie dans les urines (je l’apprendrais par la suite, après avoir demandé mon dossier). Je profite de mes derniers instants de femme enceinte. Je regarde sur internet à quoi ressemble un enfant qui naît à 31+5sa. Ça va, ça ressemble à un bébé finalement… Pour un bébé « pas fini ».
Les gens du bloc opératoire ont été formidablement gentils avec moi, ainsi que la petite étudiante qui s’occupait de moi en soins intensifs. Juste avant la césarienne, une femme prévient un interne : « Regarde le tensiomètre avant, et regarde le tensiomètre après la césarienne ».
Ils prennent mon fils, il crie, je suis rassurée, et il est plutôt mignon ce petit bout. Ils l’amènent de suite à côté pour s’en occuper. L’interne est stupéfait : ma tension a immédiatement chuté dès la fin de la césarienne.

Quelques heures plus tard, mon mari vient me voir en larmes, pour me montrer le petit en photo. Je ne comprends pas pourquoi il pleure, il a vécu des choses que moi je n’ai pas vues, et qu’il me racontera par la suite. Ce soir-là, je dors avec un sac de sable sur le ventre (pour éviter les hématomes apparemment). Non, ce n’est plus le poids de mon bébé que je porte.
Le lendemain, mon père vient me voir pour me féliciter (je n’ai le droit qu’à très peu de créneaux pour les visites).
Pourquoi me félicite-t-on de ça ? Je n’ai rien fait, on a pris mon fils de mon ventre pour une raison que j’ignore encore. Ma sœur pleure, on ne l’autorise pas à rentrer me voir car elle est malade… On me demande de me lever, car si je n’y arrive pas, je ne pourrais pas remonter et aller voir mon fils. Mon instinct me fait me lever, et faire quelques pas, malgré la douleur. Je remonte à l’étage, juste avant d’arriver dans ma chambre, cette image restera gravée à jamais : on a enlevé le berceau qui se trouvait dans ma chambre. Non, il n’y aura pas de bébé à aller voir dans cette chambre…
Enfin, je vais voir mon fils avec mon mari, qui m’aide avec le fauteuil roulant. Il est branché de partout, des machines, mais il respire seul depuis ce matin ! Il pèse 1,325kg et mesure 38cm. Mon dieu, voilà, je suis maman !
Je réalise enfin, et je fonds en larmes d’avoir donné la vie à un enfant « pas fini ».

Au bout d’une semaine, la chef du service m’explique enfin ce qu’il s’est passé pour nous 2, et j’entends ce mot « pré-éclampsie ». Elle m’explique tout sur cette maladie. J’atterris, je me rends compte de la gravité des choses… Ça aurait pu très mal se finir.
S’en suivent trois jours de réanimation, 37 de soins intensifs. Beaucoup de hauts, très peu de bas durant son hospitalisation. J’ai fait plusieurs séjours à l’hôpital suite à ma pré-éclampsie, j’ai eu des problèmes à la vésicule, qui m’a été enlevée fin de cette année 2014. Cette année fut la plus éprouvante de ma vie physiquement et mentalement. Les trois premières années de vie de mon fils furent compliquées.

J’ai de nouveau été enceinte en 2016 de sa petite sœur, problème de tension à partir du 4ème mois. J’étais à 22/10 en permanence, ma sage-femme me demandait comment je faisais pour tenir encore debout. Avec un très bon suivi, j’ai donné naissance par césarienne programmée à ma fille au terme de 37SA, 3,300kg pour 49cm !
La 2ème  grossesse fut difficile mentalement, j’ai fait de grosses crises d’angoisse à partir du moment où j’ai dépassé le terme de mon fils. Et après l’accouchement, j’ai sombré dans une dépression post-partum.
Mes deux enfants vont très bien, mais plus jamais je n’envisage une 3ème grossesse. Mes deux grossesses furent un traumatisme pour moi, de manière différente. »

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