Contrairement au témoignage d’Audrey, la semaine dernière, où ses grossesses d’après se sont passées sans encombre, aujourd’hui Doriane raconte son expérience : deux grossesses avec pré-éclampsie précoce à peu près au même terme malgré le traitement et le suivi plus rapproché pour la deuxième qui a été plus sournoise avec un HRP… La pré-éclampsie apparaît principalement lors de la 1ère grossesse mais dans quelques cas lors de grossesses d’après… D’où l’importance de partager au maximum l’information et de soutenir la recherche afin de trouver enfin un moyen de mieux prévenir et traiter cette pathologie de grossesse et éviter des drames comme celui qu’ont connu Doriane et son mari. Force et courage à tous les parents qui ont vécu une telle épreuve et toutes nos pensées au petit Antonin.
« Nous sommes en 2017, le 26 avril plus exactement, quelques jours de retard et des pertes blanches me font faire un test. À peine quelques secondes plus tard, il s’avère positif. Nous sommes aux anges et c’est un très beau cadeau d’anniversaire pour mon compagnon. Les premiers mois se déroulent sans encombre, juste quelques nausées mais rien de bien méchant.
Le vendredi 16 juin, première échographie , nous sommes sur un nuage et puis suit le rendez-vous avec le gynécologue. Je fais de la tension, me voilà sous traitement. Nous annonçons enfin la grossesse à nos proches et à nos amis, puis partons profiter de nos dernières vacances à deux.
Juillet passe, puis voilà août et la T2. On nous annonce que c’est un petit garçon. Papa est plus qu’heureux. Rendez-vous avec le gynécologue : je lui parle des œdèmes que j’ai aux pieds et sa réponse nous surprendra encore : « Il fait chaud , ça va passer ».
Septembre arrive, je continue de travailler malgré la tension et les trajets qui commencent à devenir source de stress. Le jeudi 21 septembre – je suis à 25SA+4 – je pars travailler mais je sens que quelque chose ne va pas… La matinée passe, nous allons manger mais je n’ai pas d’appétit et je ressens une vive douleur sous la poitrine. En début d’après-midi, les chefs d’équipe ne me demandent pas mon avis et appellent le 15 qui nous envoie dans un premier temps une ambulance. Ils mettront plus d’une heure à arriver. Les examens ne sont pas bons. Ma tension est à 22/10, ils rappellent le 15 qui nous envoient le SAMU.
Je suis conduite dans la maternité où je suis suivie, elle est de type 3. Une fois sur place, le diagnostic tombe : on soupçonne une pré-éclampsie. Une « quoi » ? Ce terme nous est totalement inconnu. Les médecins nous feront gagner quelques jours, car le lundi alors qu’ils me parlent de sortie avec suivi à domicile mon état se dégrade. Ma tension remonte malgré les traitements, la barre épigastrique refait son apparition, le premier bilan sanguin est bon.
En début de soirée, on en refait un second et on me descend aux urgences maternité pour surveiller bébé au Doppler. À 23h00, on vient nous annoncer que le bilan est mauvais : mes plaquettes sont en chute libre et mes enzymes du foie grimpent en flèche. Je fais une complication appeler HELLP syndrom. Et là, tout s’enchaîne : on m’injecte un produit pour la maturation du cerveau de bébé et nous filons au bloc.
Notre petit garçon naîtra à 00h28, le 26/09 et sera emmené en réanimation néonatale. Je ne verrai mon fils que 36h plus tard, le prendrais dans les bras au bout de 22 jours et nous rentrerons tous les 3, le 22 décembre au bout de 87 jours.
Aujourd’hui notre petit garçon a un peu plus de trois ans. C’est un petit garçon espiègle et malicieux mais un rayon de soleil au quotidien.
Le 22 septembre 2020, nous apprenons que je suis à nouveau enceinte. C’est une véritable surprise car j’ai un stérilet. J’ai un peu de mal à encaisser car de plus au travail nous venons d’être mutés et j’ai peur que cela soit mal vu. Mais nous sommes tout de même heureux car nous souhaitions agrandir la famille même si nous connaissions les risques de récidive (25% de risque de récidive en cas d’antécédents de HELLP, 6% de risque qu’elle soit aussi sévère). Suite à la pré-éclampsie à ma 1ère grossesse, je suis placée sous Aspegic 100mg© et mon médecin traitant modifiera mon traitement pour l’hypertension (conservé après la naissance de notre premier). Je choisis également une maternité de type 3 pour mon suivi qui sera médicalisé : un rendez-vous par mois avec le gynécologue.
Tout se passe bien (même si je vis avec une épée de Damoclès au-dessus de la tête, la récidive me fait peur), ma tension semble maîtrisée avec le traitement mis en place. Le holter tensionnel, réalisé mi-janvier à la demande de mon cardiologue, le confirmera.
Arrive début février, je fais une grosse poussée de tension, mon traitement ne suffit plus. Je suis hospitalisée 24h et avec le cardiologue, mon traitement est ajusté. Bébé continue de bien bouger, puis le jeudi précédent la naissance de notre fils, je perds les eaux. N’ayant pas connu cela à mon premier, je ne m’inquiète pas trop et pense à des fuites urinaires…
Le week-end passe et le lundi, quelques traces de sang… Je prépare un sac de vêtements pour moi et des affaires pour laisser mon grand chez papi et mamie, puis après avoir déposé mon fils, je file aux urgences maternité. Je suis à 26SA+4. Une sage-femme m’ausculte et me fait faire le test bandelette urinaire. Les protéines sont positives, la tension est haute , je fais une récidive.
L’interne arrive et me fait une échographie mais ne dit rien et appelle le médecin en urgence. Là, je comprends que quelque chose ne va pas. Le médecin fait une échographie et me dit : « Vous faites une récidive avec hématome rétro placentaire ». Ma seule question sera : « et mon bébé ? « . Et le ciel s’effondre…son cœur avait cessé de battre.
Je serais placée en salle de pré-travail, un bilan sanguin sera effectué pour écarter le HELLP et vérifier mes facteurs de coagulation à cause de l’Aspegic©, et mon conjoint, prévenu, me rejoindra.
À 16h30, je suis emmenée au bloc. Notre fils naît sans vie à 17h00 le 22 février 2021. Mon compagnon ressent le besoin de le voir et de le porter. Je n’accepterai que deux jours plus tard grâce à la présence de la psychologue du service. Après le bloc, je suis transférée en unité de soins continus car ma tension reste haute et que des complications survenues pendant la césarienne nécessitent une surveillance. J’y resterai quatre jours, y recevrai une transfusion de deux culots de sang puis le mercredi, je rencontrerai mon fils et le porterai. Il avait l’air endormi, si paisible. Le lendemain, on me transfère dans le service de grossesse pathologique où je resterai jusqu’au samedi, jour où je suis autorisée à rentrer.
Avec mon grand, les journées passent vite même s’il me rejette. Le plus dur est le soir quand la maison est calme. Le jeudi 4 mars dernier, nous avons accompagné notre petit Antonin pour son dernier voyage. Il repose désormais auprès de ses arrières grands-parents et veille sur nous depuis là-haut.
La pré-éclampsie est une pathologie de grossesse bien trop méconnue qui touche principalement les premières grossesses. Prise à temps pour notre premier, les médecins nous ont sauvé la vie à tous les deux. Sournoise et silencieuse pour notre deuxième, elle emportera la vie de notre petit garçon. Nous n’envisageons plus de grossesse, nous profiterons de ce que la vie nous a déjà offert. Aujourd’hui, même si c’est encore frais, nous devons garder la tête haute et continuer d’avancer pour le grand frère de notre Ange, Antonin. »
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