Découvrez le témoignage de Pauline, atteinte du Syndrome des antiphospholipides (SAPL), maladie auto-immune qui a vécu une pré-éclampsie à 36SA compliquée d’un HELLP syndrome.
« Je m’appelle Pauline et j’ai 31 ans. Avec mon mari, nous souhaitions un bébé depuis quelque temps déjà. Étant atteinte d’une maladie auto-immune – le syndrome des antiphospholipides (SAPL) – je savais d’office que ma grossesse serait compliquée… Le SAPL est caractérisé par la survenue de manifestations thrombo-emboliques (formation de caillots de sang dans les vaisseaux, veines ou artères) et/ou la survenue de complications durant la grossesse.
Être enceinte de manière spontanée, je ne sais pas ce que c’est : avant même d’essayer, j’avais déjà mon protocole, vu entre la gynécologue de l’hôpital et l’interniste qui me suivait. Mi-octobre 2017, j’ai su très vite que j’étais enceinte car je me testais tous les mois afin de pouvoir commencer le traitement le plus vite possible. Je connaissais le programme qui m’attendait : injection d’anticoagulants tous les jours avec prise de sang et échographies très fréquentes… C’était contraignant pour mon entourage, mais pour moi c’était « ma » normalité ! D’autant que l’équipe qui m’accompagnait était géniale et super flexible, donc jusque-là le bonheur d’être enceinte absorbait tout. Les soucis ont commencé assez vite, tout d’abord, lorsque j’ai eu un faux positif pour le DPNI (où l’on m’a signalé qu’il y avait 99,6 % de probabilité que mon enfant soit trisomique) au bout de 4 mois de grossesse. On a dû me faire une amniocentèse en urgence et, au bout de longues journées d’attente cauchemardesques, on m’a annoncé que tout était finalement normal… Personne n’a su expliquer la raison de ce faux-positif. Peut-être mon traitement…
J’étais donc enceinte de 4,5 mois, avec beaucoup de traitements, j’étais très surveillée mais c’était quand même la fête… En fait, je pense que je ne m’étais pas assez préparée aux complications qu’induisait ma maladie soit par déni ou simplement par ignorance. Je ne savais pas ce qui m’attendait… Peut-être ne m’avait-on pas assez alertée ou bien j’ai trop minimisé… Je savais que je risquais une pré-éclampsie donc je contrôlais ma tension mais c’est vrai que je ne m’étais pas plus renseignée que cela… Surtout je n’avais pas du tout conscience de la dangerosité de ces complications ! Mon terme était prévu pour fin juillet.
Mi-avril, j’ai eu les premières complications physiques. j’ai été hospitalisée pour des douleurs dans tout le corps, surtout aux articulations. j’avais également des migraines, chose que je n’avais jamais eu auparavant. C’est là que les médecins ont commencé à être plus stricts : arrêt de travail et repos obligatoire. A partir du 10 juin, les vrais problèmes ont commencé. J’ai été admise à l’hôpital le lundi 10 pour de fortes douleurs au ventre. La fameuse “barre » n’était pas encore apparue mais je n’étais vraiment pas bien. J’avais également des œdèmes/brûlures sur les mains. Je n’ai jamais signalé ces symptômes pensant que c’était insignifiant… J’ai donc passé la journée aux urgences de la maternité : monitoring, prises de sang, tensions… Je n’étais pas bien mais les résultats étaient corrects. Je suis donc rentrée à la maison le soir. Le lendemain, pas d’amélioration, je suis retournée à l’hôpital, mais toujours rien… Le mercredi, idem. Le jeudi, toujours pareil, mais je n’allais pas passer ma fin de grossesse à aller à l’hôpital tous les jours, j’ai donc décidé de prendre sur moi…(ce qui fût sans doute une erreur). Pourtant , c’est dans la nuit que tout s’est accéléré.
Afin de ne pas déranger mon mari une nuit de plus, j’ai décidé de dormir dans la chambre d’amis. Il m’a retrouvée le lendemain matin vers 7h00, en chien de fusil par terre dans le salon. J’avais été incapable de l’appeler pendant la nuit, trop faible. Il m’a donc reconduite directement aux urgences. Là, toujours la même chose : monitoring, prise de sang, tension…les résultats commençaient à se dégrader mais n’étaient toujours pas catastrophiques. A 14h00, nous avons quand même effectué mon injection d’anticoagulants (grosse problématique de ma maladie, l’arrêt des anticoagulants est obligatoire pour l’accouchement mais très dangereux donc il faut que cet arrêt soit le plus court possible), cela impliquait de ne pas accoucher tout de suite sous risque d’hémorragie. Hélas, deux heures après, les résultats sont tombés et ils étaient mauvais. La pré-éclampsie « sévère » étaient “enfin » diagnostiquée. J’étais tellement mal, cette fameuse « barre » me faisait atrocement souffrir, je vomissais et étais quasiment évanouie par la douleur. Après une tentative de déclenchement infructueuse dans l’après-midi, en fin de soirée j’ai été emmenée au bloc pour une césarienne d’urgence (sous anesthésie générale) et notre fils Octave est finalement né à 23h52. Lui, était sauvé !
Malgré son arrivée précoce (36 SA), il s’est tout de suite bien débrouillé…Il a quand même été conduit en néonatologie mais arrivait dès le début à respirer seul… En fait, c’est pour moi que tout s’est compliqué. Durant la césarienne j’ai fait une hémorragie qui a nécessité plusieurs transfusions. Le lendemain, j’ai été admise en chambre où j’ai enfin pu rencontrer mon fils (12h après l’accouchement). J’ai tenté une mise au sein, je souhaitais allaiter mais vu ma fatigue, il a vite été ramené en néonatologie. J’ai de nouveau été admise en réanimation, le dimanche matin. Je faisais un HELLP Syndrome compliqué par un syndrome catastrophique des antiphospholipides. (Il est dû au fait que les tout petits vaisseaux se bouchent. Cela peut rapidement conduire à ce que certains organes très importants – notamment le cœur, les poumons et les reins, ne fonctionnent plus correctement). Après 10 jours de réanimation en Unité de Surveillance Continue avec des moments vraiment très compliqués, j’ai été admise en maternité quelques jours puis enfin, en unité “Kangourou » pour 11 jours de plus (unité mère-enfant, qui permet de n’avoir qu’un couloir qui nous sépare mon bébé et moi).
J’ai été au total séparée de mon fils 23 jours, même si sur les derniers jours, je pouvais le voir quand je voulais/pouvais. Nous avons enfin dormi dans la même chambre, le 7 juillet, soit 23 jours après sa naissance. Nous sommes sortis de l’hôpital le lendemain et j’ai mis des mois à m’en remettre.
Malgré toutes ces épreuves, il y a eu quelques belles victoires, la plus belle étant quand même l’allaitement. A force de persévérance et de tire-lait quotidien (le lait était jeté car impossible de le donner à mon bébé à cause des traitements), j’ai pu commencer à allaiter mon fils au bout de trois semaines ! Le personnel de l’hôpital a tout fait pour m’encourager pendant mon épisode compliqué à l’USC mais les médecins nous ont dit après coup qu’ils ne pensaient pas que j’y parviendrais. Je pense aussi beaucoup à mon mari : entre sa femme en réanimation entre la vie et la mort et, son fils en néonatologie, ce n’était pas l’idéal pour commencer une vie à trois…
A posteriori, je pense que je ne me suis pas assez écoutée. Je me savais très surveillée, et donc je me suis laissée porter. J’avais peur et je ne voulais pas tout dramatiser. Après coup, je pense qu’il y avait quelques signes d’alerte… De peur de déranger ou d’exagérer, je n’ai pas osé tout dire ! Je n’ai qu’un conseil à donner : écoutez-vous et signalez tous les symptômes, même ceux qui vous semblent insignifiants ! Maintenant, mon fils a 15 mois, il est en pleine forme. Nous profitons pleinement de notre vie à trois et pour ce qui est d’une future grossesse, pour le moment, on attend… Personnellement, j’en rêve (même si je suis terrifiée) mais d’un point de vue médical, c’est encore trop tôt, n’étant toujours pas remise totalement de cet accouchement. »