Je suis à deux doigts de perdre ma fille et je suis également en danger.

Annaëlle a vécu une pré-éclampsie discrète et rapide à 33SA. Elle n’avait aucun symptôme jusque là. Elle parle également du manque d’empathie du personnel médical pendant son hospitalisation et de l’impact psychologique de cette naissance bousculée.

« Le 12 janvier 2021, enceinte de 33SA, vers 18h00, ma sage-femme m’envoie aux urgences gynécologiques car j’avais une tension trop élevée… Je suis montée jusqu’à 17. Arrivée aux urgences, seule, j’explique la situation. On me garde et on me fait faire un test urinaire et ils me prennent la tension sur plusieurs minutes, me font également des prises de sang…

Quelques heures plus tard le médecin de garde m’annonce que je fais une pré-éclampsie. Je reste bouche bée devant elle car je ne connais absolument pas ce terme et je n’avais jamais eu de symptômes de quoi que ce soit. Elle m’explique. Le choc. En quelques heures, j’apprends que je suis à deux doigts de perdre ma fille et que je suis également en danger. Moi, à vrai dire, je m’en fiche mais pas ma fille. J’avais une protéinurie dans les urines trop élevée et une tension qui ne faisait que monter. Ils me gardent en hospitalisation. C’est un choc car ma grossesse se passait bien depuis le début.

Pendant plusieurs jours, j’ai vécu un enfer, aucune empathie des professionnels, sage-femmes, infirmières, médecins… J’ai eu le droit à plusieurs réflexions car je n’avais eu aucun symptôme auparavant ou parce que je pleurais. Un médecin de garde me dit : « Madame, ne pleurez pas, d’autres femmes sont hospitalisées comme vous mais depuis le début de leur grossesse, elles ». Oui et alors ?! C’est normal d’avoir peur… Je fais test sur test, prise de tension, monitoring, rien ne s’arrangeait. Ma tension montait jusqu’à 21, on essayait un traitement pour ma tension afin de la stabiliser… Les médecins m’avaient dit, soit je reste hospitalisée jusqu’au terme (prévu le 10 mars), soit le traitement est le bon et je rentre chez moi avec suivi d’une infirmière à domicile, soit je me ferais déclencher mais pas avant 34SA car sinon grande prématurité. 

Une pré-éclampsie éclair

Le 17 janvier 2021, rien n’allait plus… J’étais en salle d’accouchement pour surveillance. On vient me dire que ce sera une césarienne en urgence car le rythme cardiaque de ma fille ralentissait. On réussit même à me dire de me calmer et de ne pas stresser car ce n’est pas bon… Sauf que dans ces moments-là, désolée d’avoir peur… Au final, quelques minutes plus tard, on revient me voir pour me dire que tout va bien, ma fille avait réussi à reprendre du poil de la bête. Ok. Je retourne dans ma chambre après une journée des plus éprouvantes. On décide de me faire les injections pour le développement des poumons du bébé, au cas où… 

Le lendemain, 18 janvier 2021 à 9h30, on me remet en salle d’accouchement pour surveillance. À 10h00, on m’annonce la véritable césarienne d’urgence car ma fille est en détresse. J’appelle mon conjoint, je lui dit de venir car ils ont déjà réservé le bloc pour nous, faut y aller maintenant tout de suite. Il arrive vers 10h45. On descend au bloc à 11h00. J’étais terrifiée…

À 11h42, ma fille naît. Elle a pleuré dès sa sortie. Soulagement. Je ne l’ai vue que 10 secondes. Je reste en salle de réveil pour stabiliser ma tension. Encore cette foutue tension… Je n’en peux plus, je suis fatiguée de ces jours de stress, je veux voir ma fille, la prendre dans les bras, la sentir. Jusqu’à 17h00 je suis restée en salle de réveil. On me monte en néonatalogie pour enfin la voir. Elle est minuscule, une vraie crevette qui ne tient que dans une main, je la sens fragile. Branchée partout. Mais elle est tellement magnifique.

Elle est restée hospitalisée jusqu’au 11 février. Nous avons fait la route tous les jours pour être auprès d’elle. Elle était en pleine forme malgré sa prématurité. Elle a réussi à manger seule après avoir été sondée, elle a pris du poids normalement. Nous avons fait une nuit avec elle en chambre kangourou juste avant sa sortie. Moi, je suis sortie le 23 janvier avec un traitement pour ma tension que j’ai gardé quelques semaines après l’accouchement. 

Ma fille, Victoire, est née le 18 janvier 2021 à 33SA+5. Elle pesait 1,655kg et mesurait 41cm. Aujourd’hui, elle a 17 mois et pèse 8,810kg pour 74cm. Elle porte encore du 9 mois, voire du 12 de temps en temps. C’est marrant et tellement mignon. Mais tout va bien, elle n’a aucune séquelle de cette prématurité. 

Un réél traumatisme

Aujourd’hui, je définirais mon accouchement comme un cauchemar. Je l’ai très mal vécu, j’ai souffert et encore aujourd’hui, c’est très dur de vivre avec cette cicatrice qui me rappelle tout cela. Pour moi, cela n’a pas été un bonheur, non je ne l’ai pas mise au monde, on l’a fait à ma place. 

Je n’ai pas tout détaillé dans mon histoire mais j’ai souffert psychologiquement et physiquement. Du premier jour à l’hôpital jusqu’à la sortie de ma fille. J’ai été suivie psychologiquement pendant plusieurs mois et encore aujourd’hui, de temps en temps, je fais appel à ma psychologue pour évacuer. Ma fille va bien et c’est le plus important mais moi je souhaite me reconstruire. On ne parle pas assez de la pré-éclampsie. Cette pathologie reste encore dans le silence alors que de nombreuses femmes enceintes en souffrent à tout stade de la grossesse. »

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