Témoignage d'Alexandra

Pré-éclampsie : Cette intuition nous a sauvées ma fille et moi

Alexandra, qui souffrait d’hyperémèse gravidique aussi, a écouté son sixième sens, comme elle le dit. Cela lui a permis d’éviter le pire pour elle et son bébé. Elle parle également du traumatisme de la pré-éclampsie et des séquelles psychologiques en post partum.

« Avant de tomber enceinte moi-même, j’ai suivi les grossesses de ma maman puisque j’ai été fille unique pendant 8 ans. J’avais un léger souvenir de deuxième grossesse difficile et d’hypertension. Je ne savais pas à ce moment-là que d’entendre des adultes en parler allait me sauver potentiellement la vie plus tard pendant ma propre grossesse. 

Je suis très rapidement tombée enceinte en avril 2021, et j’ai été malade avant même de savoir que j’étais enceinte. J’ai souffert d’hyperémèse gravidique en début de grossesse (jusqu’à la fin du 5ème mois). Ce qui fait que je n’avais pas pris de poids mais plutôt perdu… 

Une intuition…

L’hyperémèse a poussé ma gynécologue à me suivre très régulièrement, j’avais des rdv toutes les deux semaines tellement mon état était instable. À 16SA environ, j’ai dit à ma gynécologue : « Je crois que je vais faire une pré-éclampsie ». Elle a eu l’air un peu perturbée et m’a rassurée en disant que j’étais suivie pour la protéinurie (mensuellement) et que ma tension était prise toutes les deux semaines. J’ai quand même acheté un tensiomètre mais au final je ne m’en suis pas beaucoup servie, j’avais peur. Je le sentais que ça allait m’arriver, c’est assez étrange car au final je ne savais pas trop ce que cela impliquait. J’ai donc commencé à me renseigner, j’ai enregistré les symptômes et j’étais consciente des risques donc je savais que j’allais pouvoir identifier là pré-éclampsie quand elle allait venir à ma rencontre. À ce jour, je suis encore apeurée de ce sixième sens qui au final était plus que juste. Cette intuition nous a sauvées ma fille et moi. 

Mi-novembre, à la moitié du 7ème mois de grossesse, j’ai encore eu ce pressentiment mais vraiment plus fort. J’ai commencé à avoir les chevilles gonflées, puis les jambes. J’ai cru à de la rétention d’eau. Mais je ne baissais pas la garde pour autant. En allant à un cours de préparation à l’accouchement (avec ma sage-femme cette fois), je lui demande de prendre ma tension (je rappelle qu’à ce moment-là à part les chevilles, je n’avais aucun autre signe), elle rit mais le fait pour me rassurer. Pendant qu’elle prend ma tension, je lui explique que je sens que quelque chose ne va pas. Elle me pose des questions et encore une fois aucuns symptômes donc elle me rassure. Puis l’appareil s’arrête, elle me regarde d’un air inquiet et me dit : « 15/9 ». Elle m’envoie à la pharmacie en express pour des bas de contention et me dit d’aller voir ma gynécologue pour une échographie et un deuxième contrôle le lendemain matin. Ça tombait bien car j’avais rdv justement (le destin ?).

Le lendemain, même mesure, la gynécologue m’envoie directement à la maternité pour un monitoring. J’y reste deux heures, je fais une protéinurie et au bout des deux heures, je sors avec 14/9 et une protéinurie sur 24h à effectuer. Un peu choquée je me retrouve dans une ambiance où je me sens en danger et j’ai l’impression que personne ne s’inquiète. Entre temps, je sens moins ma fille bouger, je gonfle de partout, je vois ces mouches devant les yeux… Les symptômes arrivent tous d’un coup sans prévenir et je commence à paniquer. 

Tout s’accélère

Le lendemain (mercredi 8 décembre), je fais ma protéinurie. Le 9, j’avais une échographie de contrôle avec l’obstétricien qui m’avait fait les échographies officielles et qui travaille à la clinique où je compte accoucher, pour un contrôle car bébé semblait petit à la T3 (25ème percentile). Je reste à l’affût des résultats de la protéinurie des 24h (que je dois recevoir par mail) pendant que je suis en salle d’attente. 

C’est mon tour, il me demande si ça va, j’explique les péripéties de ces derniers jours (monitoring, tension élevée, prise de poids…), il passe à l’échographie et semble perturbé. Il me dit : « On va devoir sortir votre bébé avant terme car il est désormais au 3ème percentile, il y a arrêt de la courbe de croissance, aucun bénéfice à la garder à l’intérieur ». Je suis soulagée, ils vont la sortir, elle est en vie et moi aussi. Il m’explique donc que je serai déclenchée lundi (dans cinq jours donc), mais au fond je sens que je n’ai pas ce temps. Alors je donne tout, je lui explique que je pense faire un début de pré-éclampsie. Il semble presque amusé (il a dû se demander qui j’étais pour dire ça alors que je ne suis pas médecin) mais il a été à l’écoute, il a pris ma tension, regardé mes résultats et là… Il appelle la clinique devant moi et me dit que je dois accoucher très rapidement, que rien n’est bon, ni la tension, ni la protéinurie, ni bébé…

Je ne comprends pas, enfin si, mais là c’est le choc. On me demande de traverser la route, d’aller m’enregistrer à la clinique… Je pensais rentrer chez moi et revenir, mais non… J’appelle mon mari en pleurs… On me parle de césarienne… Je suis perdue. Tout a basculé en deux minutes. Une seconde j’allais être déclenchée lundi et, la minute d’après on me presse pour être déclenchée. 

Une fois admise à la clinique, je suis déclenchée et rien ne bouge pendant 24h (ça ne bouge pas assez on va dire). Donc 24h après mon arrivée à la maternité, on me dit : « On va devoir partir sur une césarienne ». La phrase n’avait même pas fini d’être prononcée que 10 membres (l’équipe de la césarienne) du personnel arrivent dans ma chambre. Je m’effondre…

Quoi ? Je n’ai pas été préparée, expliquez-moi, j’ai besoin d’entendre que mon bébé est en danger. J’ai cru que c’était une césarienne d’urgence jusqu’à ce que je lise : « Césarienne programmée » dans le carnet de santé de ma fille. Pardon !? 

Bref, dans le bloc l’ambiance était extra, j’étais aussi détendue que je le pouvais (c’est-à-dire pas vraiment, mais bon…). On me pose l’anesthésie locale, je me détends, ils font entrer mon mari (grand merci). Ça y est, c’est le moment, nous allons rencontrer notre fille. Pas de la façon idéale mais je ne pense qu’à une chose « pourvu qu’elle aille bien ». Elle était estimée à maximum 2,3kg. Je sens ma main droite gonfler pendant la césarienne, je prends peur, je pense à la mort et je prie pour pouvoir rencontrer ma fille. Je répète encore et encore : « Ma main gonfle trop, c’est pas normal, ma main, regardez… ». On me dit que ça va passer. Mais je ne suis pas vraiment rassurée. On me demande de pousser (là aussi je les remercie) et puis j’entends le plus beau petit cri de ma vie et je pleure, je relâche la pression et je prends conscience que c’est terminé. 

Après la césarienne, ma tension ne baisse pas, le personnel vient me donner des médicaments pour essayer de la faire baisser. On change de tensiomètre, on pense qu’il ne fonctionne pas, on revient toutes les 30 minutes avec un visage grave. Pour moi c’était évident, j’allais mourir, j’avais réussi à donner vie à ma fille et je n’allais même pas la connaître. J’ai eu si peur que j’ai développé une phobie de la mort. À la sortie de la maternité (ma tension avait bien baissé mais restait élevée), on m’a dit que c’était à moi de me faire suivre, que peut être que l’accouchement avait déclenché une maladie qui engendrait cette hypertension et que j’allais devoir prendre des médicaments à vie. J’étais paniquée donc j’ai pris rdv pour un contrôle de tension, le 29 décembre (anniversaire de ma maman) et alors que j’ai accouché le 10… Ma tension est redevenue acceptable après 19 jours, quel soulagement ! 

Un choc psychologique

Comme j’ai expliqué plus haut, j’ai développé une phobie de la mort. Pendant six mois après l’accouchement, je me suis enfermée chez moi, j’avais peur de sortir, peur de mourir, je guettais le moindre signe d’hypertension, j’avais si peur. Cette expérience m’a changée à tout jamais, je reste prudente et j’ai encore peur mais je suis une thérapie pour m’aider à prendre le dessus sur cette peur incontrôlée. 

Tout va bien, je vais bien, ma fille va bien. Elle faisait 2,150kg à la naissance finalement…mais elle va très bien et à 9 mois désormais. Cette expérience me laisse sans voix, mon sixième sens et mon intuition m’ont sauvée. Je suis reconnaissante d’avoir ma fille dans mes bras car je sais que cette expérience me bloque totalement par rapport à une deuxième grossesse. 

Courage à toutes les mamans et surtout, écoutez-vous ! Vous n’êtes peut-être pas médecins mais vous êtes maîtres de votre corps et vous pouvez le comprendre bien mieux que tous les médecins sur terre parfois. » 

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