Agathe a eu une pré-éclampsie avec HELLP syndrome au moment de la césarienne d’urgence mais elle a été très bien entourée par des professionnels alertes qui ont su bien prendre en charge la situation et la soutenir dans cette épreuve. Elle a bénéficié d’un très bon suivi après la pré-éclampsie.
« Nous sommes le 23 septembre 2021. Je rentre d’un restau entre copines pendant lequel je disais que j’allais enfin pouvoir profiter pleinement de mes six dernières semaines de grossesse, moi qui n’ai pas arrêté pendant ma super grossesse. J’ai mal à l’estomac … Je suis une habituée, un Gaviscon™ et au dodo. Réveillée une heure plus tard par ce mal d’estomac, je vais passer la nuit à faire les cent pas dans la maison en respirant du mieux que possible, essayer de me faire vomir (ça devrait me calmer…). C’est encore pire… Ce sont peut-être les fameuses fausses contractions, après tout bébé est encore haut. À 5h30 (le 24 septembre), je réveille le papa, je n’en peux plus. Direction les urgences.
On essaie d’installer le monitoring mais je ne tiens pas en place. Je vomis à nouveau, une fois, deux fois. Analyse d’urines, prise de tension et on attend les derniers résultats pour savoir si on fait une césarienne dans l’après-midi mais c’est très probable. Ils sont tous très calmes. Je me dis qu’ils savent ce qu’ils font donc cela veut dire pas de danger pour le bébé qui était prévu début novembre. De toutes façons, j’ai tellement mal… Le gynécologue revient moins d’une heure après (il doit être 9h00 ?) en me disant : « On va vous préparer, on va au bloc ». Ok, 1000% confiance en lui, en eux, et j’ai tellement mal de toutes façons.
Dès la pose de la rachi anesthésie, j’ai été délivrée de ce mal d’estomac. J’ai très bien vécu la césarienne. Mon petit Marius (2,160 kg et 47 cm) a crié et toute la douleur était à présent derrière moi (j’ai même plaisanté avec le gynécologue pendant qu’il me recousait), enfin, c’est ce que je pensais… En salle de réveil, je fais une tachycardie, tout le monde s’agite autour de moi mais je vais bien. On m’annonce qu’avec la méga grève des sages-femmes et les soins dont j’ai besoin je vais être transférée car peu de personnel attendu cette nuit. Mon conjoint a déjà vu avec le pédiatre pour le transfert de mon bébé qui va bien malgré une toute petite détresse respiratoire apparemment. J’accepte. J’aperçois mon bébé deux minutes avant qu’il ne parte pour le nouvel hôpital, il est branché partout, avec un masque (est ce qu’on m’a menti ? Va-t-il bien ?). De toutes façons, il est prématuré et c’est pour son bien apparemment.
On revient me voir une heure après m’annonçant que je ne pourrai pas être transférée ce soir car il n’y a pas de place, c’est la m**** là-bas aussi… Je relativise, c’est peut-être mieux pour me reposer après la césarienne, le papa est avec lui H24. Je vous passe toute la bataille que j’ai dû mener tout le week-end (entre les diverses prises de tension, visites de médecins, kiné etc.) pour retrouver mon bébé au bout du 3ème jour (mon Dieu qu’il est petit en fait !) et pouvoir commencer à l’allaiter (même s’il était principalement nourri par sonde).
La semaine suivant la césarienne, je suis épuisée. Je me dis que n’est normal avec les allers-retours en néonatalogie, la césarienne… La vie de maman, quoi ! Faut que je m’y fasse et arrête de m’écouter. J’ai toujours des crampes à l’estomac (on augmente le dosage des cachets) et mes plaquettes ont chuté à tel point qu’au bout de cinq jours l’anesthésiste doit prendre la décision de me transfuser ou non… Il décide d’attendre un jour de plus. Mes plaquettes remontent le 6ème jour (merci ! moi qui avait à cœur de donner mon sang depuis quelques temps !).
Le gynécologue-obstétricien passera me voir le samedi et le dimanche (alors qu’il ne travaille pas), m’expliquera que « c’était chaud » et que je leur « ai fait une grosse frayeur ». Il me dira que j’ai fait une pré-éclampsie et un HELLP syndrome mais heureusement pendant la césarienne, et me donnera toutes les démarches de suivi post-sortie. Je ne retiens pas tout sur le moment, je l’avoue. Il dira à mon conjoint que « dans un autre pays ou à une autre époque, le bébé et la maman n’auraient peut-être pas été là » et qu’il se souviendra des chiffres de ma protéinurie pendant un moment. J’apprends que j’étais en « code rouge urgence vitale ». Je n’avais tellement pas ressenti cette urgence vitale au moment de la césarienne que je ne me rends pas bien compte. Il aura fallu que je consulte la page de l’association Grossesse Santé contre la pré-éclampsie, que je lise des témoignages et questionnements en vue de futures grossesses pour que je comprenne la gravité de ce qui m’était arrivé et que cela aura des conséquences sur d’éventuelles futures grossesses (je pensais juste prendre de l’Aspegic™ et ça ira), que je ne pouvais pas aussi bien m’en sortir et laisser mon fils orphelin. J’avoue que j’ai pris une sacrée claque ce soir-là. Mais chaque grossesse est différente alors j’ai envie d’y croire. J’ai surtout envie de remercier toute l’équipe de la maternité qui a su agir si tranquillement dans l’urgence (ce qui a sûrement permis à ma tension de ne pas dépasser les 21 😉), le maïeuticien présent alors que gréviste, le suivi que j’ai eu post pré-éclampsie car ils ne m’ont pas lâchée : deux visites chez une néphrologue pointilleuse, un bilan sanguin avec tellement de prélèvements que le labo n’avait jamais vu ça, une échographie des reins, une visite chez le cardiologue. Je continue de voir la sage-femme pour ma cicatrice et tous me disent de bien revenir les voir si nouvelle grossesse il y a.
C’est vrai que les gens – à commencer par mon conjoint – ne comprennent pas qu’un an après nous avons toujours l’esprit attaché à cet évènement mais ils ne se rendent pas compte tout le post-accouchement que cela implique et qui, pour moi, a été beaucoup plus dur à gérer émotionnellement que la pré-éclampsie en soi.
Aujourd’hui je garde encore quelques séquelles de cette pré-éclampsie, un peu de culpabilité même si j’essaie de la chasser, et surtout, les trois jours éloignés de mon bébé alors qu’il en avait le plus besoin qui me marquent plus profondément que je ne voudrais le montrer.
Merci à cette page, pour que les gens sachent, pour que les femmes agissent suffisamment tôt et merci d’être engagés pour que la recherche avance.
Agathe, maman d’un petit Marius d’1 an et en pleine forme ! »