Malgré d’importantes douleurs, on parlait de gastro-entérite à Élodie, dont les symptômes s’apparentent à ceux du HELLP syndrome. Heureusement sa gynécologue a su repérer la pré-éclampsie à temps. Élodie a pu mener une seconde grossesse surprise 4 mois après sans récidive.
« Je m’appelle Élodie, je suis enceinte de 34SA d’une petite fille qui s’appelle Kamélia lorsque les symptômes apparaissent. J’ai travaillé pendant toute ma grossesse, pas un seul arrêt maladie, je suis fière mais tellement épuisée j’arrive enfin au bout !
Nous sommes le lundi 27 décembre 2021, j’ai des maux de tête au quotidien depuis quelques jours, je ne m’inquiète pas plus que ça, je prends du Doliprane™. C’est certainement le stress qui redescend, je vais enfin pouvoir me reposer et penser à la préparation des fêtes de fin d’année. Je commence à peine mon arrêt pathologique, je me dis que j’irai à pied à la sécurité sociale qui est à 10 minutes de chez moi, mais impossible je suis essoufflée ! C’est donc ça la fin de grossesse ?
Je marche et je me dirige donc vers La Poste qui est plus proche pour envoyer mon arrêt pathologique à l’organisme juste à côté. Ça m’embête mais bon je me dis après tout ce sont les fameux symptômes de fin de grossesse.
Je rentre à la maison, doucement, essoufflée et toujours mal à la tête. Ça ne passe pas… Je suis dérangée également depuis quelques jours, j’avais lu que ça pouvait arriver juste avant d’accoucher, que c’était « normal » car le travail commence. Bof, je suis à 34 semaines, je n’y crois pas plus que ça. Je me dis que c’est certainement le stress, la fatigue ou quelque chose que j’ai mal digéré ! Les femmes enceintes et la digestion ce n’est pas simple…
Mardi 28 décembre, une douleur indescriptible au niveau de l’estomac et des remontées acides. Je prends Smecta™, Gaviscon™ et Doliprane™. Ça passera… Je me repose mais la douleur est toujours présente.
Mercredi 29 décembre, non, ça ne passe toujours pas, je vais aux urgences de la clinique qui me suit, la douleur à l’estomac et de plus en plus difficile à gérer puis ces maux de tête qui ne cessent pas… Ça m’épuise. C’est peut-être ça le faux travail ? Les contractions qui commencent ?
On prend ma tension – j’étais à 14 – on me garde quelques heures, on me donne du Loxen™. Puis on me laisse rentrer à la maison avec un comprimé à prendre le soir. Toujours autant de douleurs mais à force je supporte. On me dit que si vraiment ça ne va pas, que je n’hésite pas à revenir…
La nuit du 29 au 30 décembre, impossible de respirer, j’étouffe, la douleur me poignarde. Je ne veux pas réveiller mon mari.
Je m’en vais dans le salon, j’ouvre les fenêtres car j’avais très chaud, j’avais besoin d’essayer de respirer l’air frais. Cette sensation de suffoquer… Je n’oublierai jamais.
Je ne sais pas ce que j’ai, je suis par terre, je pleure sur mon coussin d’allaitement, je tremble et toujours et encore ces maux de tête, cette envie de vomir, cette douleur à l’estomac.
Mon mari se réveille en panique, il m’emmène tout de suite aux urgences de la clinique.
Le trajet me paraît tellement long et interminable, la fenêtre grande ouverte en plein mois de décembre, j’ai envie de crier ma douleur, et juste de réussir à respirer convenablement, je suffoque toujours, je me vois mourir…
Arrivée sur place, le médecin de garde m’ausculte, en partant j’étais montée à 16 de tension, malgré les médicaments donner la veille. Il me dit que je ne fais pas de tension tout est correct… (l’appareil ne fonctionne pas, ça n’a même pas serré mon bras) mon conjoint lui demande s’il est certain que l’appareil fonctionne ? Il s’est fait envoyer valser par le doc…
On me perfuse. Il me dit que je suis déshydratée et que c’est sûrement une gastro. Je dois me reposer. Je pleure, je sens qu’il se passe quelque chose dans mon corps, l’infirmière dit à mon mari de partir, que je dois dormir. À chaque fois qu’il s’apprête à partir, je pleure, j’ai mal, je ne veux pas qu’il s’en aille et lui ne veut pas non plus partir et me laisser dans cet état.
On appelle régulièrement l’infirmière car la douleur s’accentue. Elle ne sait pas quoi me dire à part me reposer et que Monsieur doit partir.
Plus la nuit passe, plus j’ai des nausées.
Il est environ 08h00, ma gynécologue qui me suit prend son service. Elle passe me voir directement en chambre quand elle apprend que je suis hospitalisée. Elle me fait faire un tas d’analyses. Verdict : la protéinurie ne cesse d’augmenter d’heure en heure. Une dernière échographie de contrôle : le placenta ne nourrit plus mon bébé déjà depuis quelque temps, quelques semaines ? Pourtant j’étais suivie tous les mois. Ça va tellement vite…
Jeudi 30 décembre 2021, je suis transférée par le SAMU en fin de matinée dans un hôpital de type III à 10 minutes de la clinique. On m’ausculte encore une fois, on me dit qu’il faut que j´essaie de tenir jusqu’à 36SA au moins car c’est encore trop tôt. Je veux bien, si on arrive à me faire oublier toutes ces douleurs… Au moment où la sage-femme me parle, la douleur revient intensément. Je n’arrive plus à parler. Je vomis. On me met sous oxygène et ils prennent enfin conscience de mon état et m’informent que je vais subir une césarienne en urgence. L’équipe est formidable.
Il est 16h37, je suis maman.
Je reste en salle de réveil, ma tension ne passe pas, j’ai toujours cette douleur de barre épigastrique et mes plaquettes diminuent. Je suis dans les vapes, je ne sais pas trop ce qui m’arrive. J’entends des mamans repartir en chambre. Mais moi j’attends. Dans mon sommeil j’entends que mon état se dégrade mais je me dis que c’est sûrement d’un autre patient dont elles parlent. Une histoire de potassium qui fatigue le cœur. On parle aussi des reins mais c’est tellement vague…
Prise de sang sur prise de sang, toutes les heures, mes bras sont couverts d’hématomes, on ne trouve plus mes veines, et mes plaquettes ne cessent de diminuer. On me dit que je risque une transfusion car mon état se dégrade. Je reste 3 jours en réanimation et je n’ai toujours pas vu ma fille. Je n’ai pas tout de suite pris conscience de ce que j’avais. Les médecins ne m’ont jamais dit clairement ce que j’avais eu. Je revois l’anesthésiste de temps en temps qui passe dans le service, qui m’explique que c’était chaud, qu’ils ont vraiment eu peur.
J’ai passé la nouvelle année en réanimation. L’équipe ayant fait un repas pour l’occasion, on me donne quelques friandises dans la soirée puis même le lendemain. Gourmande comme je suis, je n’ai même pas eu goût à manger tout ça. Je remonte enfin en chambre en début de soirée, nous sommes le 1er janvier 2022, je vais enfin pouvoir voir ma fille. J’ai pu me lever enfin, je regarde droit devant moi, j’ai chaud, j’entends les voix au loin. Je fais un malaise vagal. Tellement hâte de voir ma fille, que j’ai voulu aller trop vite. Hâte mais en même temps, peur, peur de cette inconnue qui est ma fille, que je n’ai pas pu serrer dans mes bras, peur de savoir si elle va mal ? Peur de la réalité… La réalité m’effraie mais je dois être forte.
C’est lorsque je sors de l’hôpital que je prends conscience que je suis maman. Moi je pouvais sortir, mais ma fille, elle, devait rester ici. C’est lorsque j’ai lu le compte rendu d’hospitalisation que j’ai su que j’avais fait une pré-éclampsie sévère avec HELLP syndrome, que tout s’est joué à quelques heures pour moi et ma fille.
Ma fille Kamélia est restée 2 mois et demi en néonatalogie. Avec des hauts et des bas. Chaque appel était un stress, chaque visite était éprouvante. Comment s’est passé la nuit ? A-t-elle fait beaucoup de « bradi » ? A-t-elle beaucoup pleuré ? Finalement, elle est sortie avec une dysplasie pulmonaire. C’est une battante…mais son système immunitaire est affaibli encore aujourd’hui, elle remonte la pente lentement, mais elle y arrivera.
Je ne remercierai jamais assez ma gynécologue qui a su prendre les choses en main et à temps, alors que certains me diagnostiquaient une gastro…
Quatre mois après je tombe enceinte, grossesse surprise ! Psychologiquement je n’étais pas prête à avoir une seconde grossesse. Surtout avec un utérus cicatriciel. Et puis, tellement peur d’y passer…. Grossesse sous surveillance +++ et sous Aspegic™ nourrisson.
Ma deuxième fille s’appelle Alma et elle est née également le 30 décembre (2022) soit 12 mois jour pour jour après sa sœur. Je me suis réconciliée avec cette date, car c’est un combat gagné et surtout, sans récidive de pré-éclampsie. »