Pré-éclampsie : Je n’ai pas été écoutée

Voici le témoignage bouleversant d’Amandine… Malgré les antécédents de pré-éclampsie de sa maman et les signes clinique, elle n’a pas été prise au sérieux jusqu’à ce que cela devienne « enfin » urgent. Heureusement, elle et sa fille vont bien mais elle garde un réel traumatisme de sa prise en charge.

« Ma mère a eu une éclampsie et a été dans le coma pour ma sœur. Onze ans plus tard, pré-éclampsie pour moi. J’avais prévenu dès le début de ma grossesse que c’était ma crainte suite aux antécédents de ma mère. Du début de ma grossesse jusqu’à à la fin à 33SA+5 j’ai été malade, vomissements à longueur de journée, aucun traitement ne fonctionnait.

À partir de 4 mois de grossesse, j’ai ressenti des signes : forts maux de tête à répétition, bourdonnement dans les oreilles et je gonflais à vue d’œil. Lors de ma deuxième échographie, on m’annonce que c’est un petit bébé mais ne s’inquiète pas car nous ne sommes pas grands non plus, elle reste en dessous de la norme niveau taille et poids mais tout va bien.

Des signes clinique clairs…

J’ai commencé par prendre ma tension début février car je me sentais de plus en plus mal avec des mouches devant les yeux et je gonflais de plus en plus. Hypertension à 17/9 à la maison. J’avais beaucoup de difficulté à marcher, je n’avais pas beaucoup de souffle et j’avais l’impression de faire un marathon à chaque déplacement. Je décide de ne pas m’inquiéter, de me reposer pour essayer de la faire descendre mais au bout d’une demi-heure, 15/9. Je parle à mon rdv mensuel avec ma sage-femme de mon inquiétude et elle rit alors aux éclats en me disant que beaucoup de femmes ont de l’hypertension pendant la grossesse, que ce n’est pas forcément une pré-éclampsie, que je vais bien !
Je lui dis aussi que je ressens très peu bébé bouger (5min par jour), encore une fois rien d’inquiétant… Je décide d’en parler à mon gynécologue que je vois également tous les mois mais pour lui, rien d’inquiétant non plus, bébé bouge à l’échographie et ma tension était bien ce jour-là.

14 mars 2022, échographie du 3ème trimestre. On me dit que mon ventre est tout petit alors que pour moi il était énorme. Elle me dit qu’il y a un problème. Je suis à 32SA+5 et à l’échographie, cela correspond plus à 22SA vu la taille et le poids. Elle me dit qu’elle ne bouge pas, même en essayant de manipuler mon ventre, qu’elle envoie mon dossier avec mon accord dans un centre spécialisé pour déterminer la cause et qu’en sortant du rdv, je dois me rendre aux urgences.

Arrivée aux urgences, je suis prise en charge rapidement : échographie, recueil d’urines, prise de sang. On me dit qu’à l’échographie, ils ne peuvent pas mesurer le périmètre crânien car bébé est trop bas, que j’ai un problème vasculaire qu’on appelle des notchs, que mes deux artères utérines sont déchirées mais que ce n’est pas une pré-éclampsie… On me dit que bébé bouge à l’échographie – mais moi je ne ressens rien – qu’il manque un peu de liquide amniotique mais rien d’alarmant.
On me demande de rentrer chez moi et que je serai avertie des résultats urinaires et sanguins dans la nuit ou au plus tard le lendemain matin. Je dois revenir le 17 mars pour un monitoring.

Le 17 mars, je me présente donc avec le recueil d’urines et j’explique que je n’ai pas eu mes résultats du 14 mars. On me répond qu’ils ne sont pas en mesure de me donner ce type d’informations… Le monitoring se passe bien mais l’interne souhaite me recevoir dans son bureau. Je m’attendais à une bonne nouvelle… Il me dit que je vais être hospitalisée car je fais clairement une pré-éclampsie !

L’hospitalisation pour pré-éclampsie

Je suis hospitalisée dans le service de gynécologie. Ils commencent, dès mon arrivée en chambre, à me faire une première injection de corticoïdes pour la maturation des poumons. On me demande de contacter le service spécialisé où a été envoyé mon dossier lors de ma 3ème échographie quelques jours plus tôt pour un rdv en urgence. Ils ne peuvent pas me recevoir avant une semaine. Les gynécologues me disent que c’est trop tard et de laisser tomber.
Mon état se dégrade rapidement, j’ai des prises de sang plusieurs fois dans la journée, deux monitorings par jour et plusieurs échographies. J’ai un traitement contre l’hypertension mais rien ne change, mon état se dégrade au point de ne plus pouvoir me déplacer comme je le souhaite. Je ne peux pas me doucher seule, je suis obligée d’être assise… J’ai de forts tremblements qui apparaissent. On me demande si je suis stressée, j’explique que j’ai eu la même chose il y a quelques jours mais que je pensais avoir froid lorsque je me suis levée en pleine nuit. Mes urines, prises de sang et monitorings ne sont pas bons. Les tremblements deviennent plus présents et mes œdèmes sont inquiétants.

Dans la nuit j’ai une énorme barre à l’estomac, je les supplie de m’accoucher, ça ne va pas du tout. Monitoring toute la nuit… Le lendemain matin, ma vision est floue, plein de mouches devant les yeux, je suis incapable de me lever. Le gynécologue de garde décide dans l’après-midi de me faire une échographie et me demande de tout lui expliquer depuis le début de ma grossesse. Le liquide amniotique a encore diminué, le poids de bébé n’a pas bougé et elle ne bouge plus du tout même en secouant mon ventre pendant assez longtemps. Mes tremblements l’inquiètent. Il me dit que je vais être déclenchée par tampon dans les heures qui suivent et que si dans 24h bébé n’est pas sorti, ce sera une césarienne mais rien d’urgent…

On me remonte en chambre et j’appelle mon conjoint pour qu’il vienne tout de suite en lui expliquant la situation car il n’avait le droit d’être présent uniquement 2h par jour. À son arrivée, je lui explique et très rapidement une infirmière vient me chercher sans rien expliquer en disant à monsieur que je reviens rapidement.
À mon arrivée dans le service maternité, la sage-femme m’explique qu’elle me pose le monitoring et qu’ensuite nous descendrons en salle de naissance pour un déclenchement par tampon. Inquiète, je lui explique que mon conjoint est resté dans ma chambre et elle me dit qu’ils vont le chercher.

Deux heures de monitoring, on me descend en salle de naissance. Une sage-femme me prend la main et demande au papa d’aller chercher les affaires de bébé. Elle me dit que tout va bien se passer, que le monitoring n’était pas bon du tout et que due à la pré-éclampsie, bébé a un gros retard de croissance. Le gynécologue que j’ai vu quelques heures auparavant arrive, me dit que bébé ne va pas supporter les contractions et que si on attend plus longtemps, cela sera très risqué pour bébé et moi. Je pars en césarienne mais rien d’urgent… Le papa est refusé, on lui demande d’attendre en salle d’attente.

L’urgence est bel et bien là !

En salle de naissance, il y avait beaucoup de monde, c’était inquiétant. La sage-femme m’explique qu’elle va me poser une sonde urinaire et là débarque un interne qui lui dit qu’elle n’a pas le temps de discuter. Elle ne comprend pas, lui demande de se calmer et qu’il n’y avait pas d’urgence. Il lui dit que si, c’est devenu urgent et qu’il ne faut pas traîner. Je ne comprends pas, je m’inquiète. Une sage-femme me prend la main tout le long de l’intervention et me dit de rester avec eux, de ne pas fermer les yeux, à plusieurs reprises. J’entends bébé pleurer, je suis rassurée. Je n’ai pas le droit de la voir ! On m’explique qu’elle est mise en couveuse et que je pourrai la voir tout à l’heure mais la sage-femme décide d’aller prendre une photo qu’elle me montre et m’envoie par sms.

Je passe en salle de réveil et elle m’explique que j’ai failli partir pendant l’intervention mais que j’avais bien réagi à l’injection. Ma tension est prise toute les 5 minutes, elle me dit de lui parler et me fait une deuxième injection. Elle me demande où est le papa. Je lui explique qu’il n’a pas eu le droit de venir avec moi alors je suppose qu’il est avec bébé. Après son appel en néonatalogie, pas de papa…
Je me demandais s’il avait bien réagi ? Malaise, pleurs ? Il me rejoint une heure après en salle de réveil, à la demande de l’infirmière. Je lui demande s’il a vu notre fille, il me dit que non, personne ne lui a rien dit. Il était en salle d’attente et il avait dû sonner pour avoir des nouvelles. Il allume mon téléphone pour voir la photo.

Nous restons un petit moment en salle de réveil et puis nous sommes conduits en néonatalogie, dans la chambre de réanimation où ma fille sera. La puéricultrice m’explique qu’elle n’a pas besoin d’aide respiratoire, que c’est super. Elle va bien, Dieu merci. Elle m’explique le fonctionnement de la néonatalogie et que notre fille y restera au moins deux mois. On me remonte dans ma chambre et on demande au papa de revenir le lendemain aux horaires habituels, c’est-à-dire deux heures dans la journée… Je demande s’il peut rester cette nuit-ci uniquement car je ne me sentais pas capable de rester seule. La cheffe de service accepte.

Le manque de bienveillance…

On vient me voir deux fois dans la nuit pour changer mes protections hygiéniques. Le lendemain, avant le changement de personnel, l’infirmière me dit de ne surtout pas me lever, qu’une infirmière viendra me retirer ma sonde urinaire et qu’on m’aidera tout doucement pour me lever.
Changement d’équipe, on ne vient me revoir qu’à 11h00 soit 4h30 après et elle me demande si je me suis levée. Je lui explique que non et les consignes que j’ai eues, que je ne me sentais pas capable non plus avec l’hypertension et que je ne tenais pas debout. Elle me dit qu’il faut se bouger, me retire la sonde urinaire et me dit : « Allez, debout ». Je tente de m’extraire du lit avec beaucoup de difficultés.
Elle me prend par les deux mains, me lève et me dit d’aller jusqu’à la salle de bain, et qu’elle revient. J’étais tétanisée à l’idée de tomber ayant la tête qui tournait. Arrivée dans la salle de bain, elle me dit qu’il faut que je me douche et que je retire le pansement de la césarienne. Je demande à mon conjoint de venir m’aider, je ne tenais pas debout. Je lui demande de le faire de peur d’arracher les agrafes ou bien que la plaie ne s’ouvre. Il décide d’aller chercher l’infirmière car il n’osait pas retirer le pansement. L’infirmière me dit que je pleurniche pour rien, qu’il suffit juste de tirer dessus, que je lui fais perdre son temps… Une fois les soins et examens faits, je demande à aller voir ma fille car le service néonatalogie m’a dit que je pouvais y aller 24h/24 et 7j/7, qu’il suffisait de demander pour y être emmenée quand je voulais mais en fauteuil vu mon état. Généralement à l’heure où le papa arrive c’est-à-dire 15h00 – et pas avant il n’a pas le droit – ils ne m’ont toujours pas descendue en néonatalogie.

Quelques jours plus tard, je suis sortante et on m’explique que je dois voir un néphrologue dans 3 mois, avec un compte rendu minime et un traitement pour l’hypertension à continuer soit Trandate™ 200mg matin et soir + Loxen™ 50mg matin et soir, et une pilule contraceptive.

Je n’ai pas été écoutée, cela a été traumatisant pour moi, je ne m’en remets toujours pas. Je suis toujours sous traitement aujourd’hui. Ma fille est restée un mois en néonatalogie. Une sage-femme de la PMI a échangé avec moi et m’a expliqué que quelques heures de plus et je serais tombée dans le coma, que je leur dois un grand merci car ils nous ont sauvées, ma fille et moi… J’étais encore plus choquée… On le sent quand quelque chose ne va pas, il faut s’écouter. »

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