Pré-éclampsie, problème de coagulation et grossesses d’après (Chahira)

Voici le témoignage de Chahira, maman de 4 enfants, qui a découvert la pré-éclampsie lors sa 1ère grossesse en 1999 et a su s’écouter. Elle a bénéficié du professionnalisme de sa gynécologue qui l’a soutenue pour les trois grossesses d’après malgré ses antécédents et un problème de coagulation. Merci à Chahira pour son témoignage qui montre les avancées en terme de prise en charge, même si la prévention reste encore faible de nos jours, et sur l’importance du suivi par des professionnels en qui l’on a confiance.

« Je suis maman de 4 enfants, j’ai 43 ans aujourd’hui. Je n’ai eu que des grossesses à risque depuis le début. Ma première grossesse avec pré-éclampsie, j’avais 22 ans.

Pendant ma grossesse, j’étais très jeune donc je ne connaissais pas tous les risques, ce qui peut se passer pendant une grossesse. Les suivis de grossesse à l’époque à la maternité étaient très « basiques ». Consultations sage-femme, et infirmière si besoin pour les prélèvements sanguins, pas vraiment de suivi gynécologique. Puis j’ai commencé à avoir des douleurs. J’ai appelé la sage-femme. Elle m’a auscultée et m’a dit que tout allait bien. Mais moi, je ne me sentais pas bien, je sentais qu’il y avait quelque chose qui n’allait pas… Elle avait pris ma tension, fait un monitoring pour écouter le cœur du bébé et m’a dit qu’il n’y avait pas de problèmes. C’était le mercredi 9 février, en 1999.

Vers 23h00, je commence à avoir très mal au ventre. Je sentais mon bébé bouger énormément et j’entendais des bruits comme si on « ouvrait un robinet ». À la suite de cela, tout est allé très vite. J’ai consulté et on m’a dit : « Madame, on va vous endormir et vous faire une césarienne ». Ensuite je ne me suis plus souvenue de quoi que ce soit. Je me suis simplement réveillée dans un endroit complètement vide. Je pensais que j’allais pouvoir poser des questions, parler, mais je n’avais plus de force. J’ai vu de loin une infirmière. J’ai essayé de l’interpeller pour la prévenir que j’étais réveillée mais impossible. Heureusement, elle m’a vue et m’a injecté de l’adrénaline sûrement car j’ai senti mon corps reprendre d’un seul coup, et mon cœur battait la chamade, je me sentais partir. L’infirmière m’a fait emmener directement en soins intensifs et c’est là où j’ai repris conscience petit à petit. On m’a expliqué que j’avais perdu connaissance, et que si je ne m’étais pas réveillée pour appeler juste avant, je serais partie… La seule chose dont je me souviens est d’avoir demandé des nouvelles de ma fille. Elle avait bu beaucoup de liquide amniotique mais elle allait mieux. Ils l’ont sortie à temps. Elle avait un petit poids, à 36SA+2, c’était une petite crevette. On m’a expliqué que j’avais fait un hématome rétro placentaire (HRP), d’où l’hémorragie, et une pré-éclampsie qui a donc généré toute cette précipitation.

Ma fille grandissait bien, elle prenait du poids, elle allait bien. J’ai commencé à l’allaiter un peu tardivement mais j’y suis arrivée. C’était un réel soulagement pour moi. J’avais gardé une peur extrême de ce qui m’était arrivé parce que je n’avais pas reçu assez d’informations : je ne savais pas ce qu’était une pré-éclampsie, que j’avais fait de l’hypertension durant toute ma grossesse et personne ne s’était alarmé. On m’avait aussi diagnostiqué un problème de coagulation et, pour que ma grossesse se passe bien, j’aurai dû avoir de l’aspirine dès le 4ème mois de grossesse pour fluidifier mon sang.

A la maternité, à Paris, j’ai été prise en charge par une gynécologue qui m’a clairement sauvé la vie. Elle m’a ensuite suivie même de loin pour les grossesses suivantes. En 1999, la pré-éclampsie était encore moins connue qu’aujourd’hui. Mon cas a servi de cas pratique pour un séminaire qui avait lieu à l’université de cette hôpital. Après mon accouchement, je suis restée 10 jours en observation. Du fait de mon problème de coagulation du sang et lorsque l’on a diagnostiqué ce premier HRP, mes grossesses suivantes allaient être à risque avec un suivi rapproché donc. De ce fait, je n’ai eu que des stérilets au cuivre, je ne pouvais pas prendre de contraception hormonale. C’est très important dès le début de faire des examens pour pouvoir déceler une quelconque anomalie ou maladie auto-immune avec, par exemple, une électrophorèse du sang (appelé aussi parfois EPP).

J’ai ensuite eu d’autres grossesses avec des suivis médicaux rapprochés et des échographies tous les mois, qui se sont donc mieux passées dans l’ensemble. Quand on sait que l’on a eu une grossesse difficile, on prend plus de précautions pour les suivantes. J’ai attendu 10 ans pour ma deuxième grossesse avec le traumatisme que j’avais subi, j’avais très peur. Mais ma gynécologue a été fantastique et m’a bien soutenue durant ces deux grossesses suivantes, sous stérilet en plus. J’étais sous aspirine dès 4 mois de grossesse puis sous Lovenox® à partir du 6ème mois de grossesse. J’ai été déclenchée à 36SA, en 2009 et 2012. J’ai été suivie par deux autres gynécologues et professeurs, que m’avaient recommandés ma précédente gynécologue qui avait déménagé entre temps en Suisse.

Pour la 3ème grossesse, également sous stérilet, tout s’est bien passé en dehors du fait que le gynécologue – qui avait été pourtant bien informé – avait oublié de le retirer après la césarienne. Quatre mois après, j’ai fait comme un début de septicémie et ma première gynécologue m’a fait venir en Suisse d’urgence pour le retirer.

Pour la 4ème grossesse, en 2015, tout se passait bien avec les traitements et suivis. Je devais aussi être déclenchée mais j’ai eu un coup de panique la veille parce que je n’étais pas rassurée par la personne qui devait me faire la rachianesthésie… Il ne me mettait pas en confiance… Je me suis retrouvée aux urgences le soir avec de l’hypertension. Ils m’ont dit qu’ils allaient faire une anesthésie générale comme bébé était en détresse respiratoire… Je voulais que l’on s’en tienne à la rachianesthésie, je voulais pouvoir voir mon bébé…. Ils m’ont rassurée et ont accepté de la faire comme prévu, même en urgence. Bébé est resté 15 jours en réanimation et je ne pouvais pas aller le voir… Je l’ai ensuite retrouvé et ai pu l’allaiter, lorsque lui et moi allions mieux.

Je remercie le personnel médical et surtout la gynécologue qui m’a suivie pendant mes grossesses. Elle m’a beaucoup soutenu, elle m’a dit qu’il ne fallait pas perdre espoir quand on a eu une pré-éclampsie, même quand on a eu une grossesse à risque comme la mienne avec réanimation.

Ayez confiance en vous et en votre médecin. »

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