Pré-éclampsie tardive et HELLP syndrome (Catherine)

Catherine, qui nous a écrit depuis Québec, nous rappelle l’importance d’être entourée de professionnels qui sont à l’écoute de nos symptômes et d’insister si l’on sent que quelque chose est anormal. Elle a surmonté sa pré-éclampsie tardive compliquée d’un HELLP syndrome avec force et courage et, le soutien de l’équipe médicale et son conjoint. Merci à cette maman lionne et belle vie à sa petite chouette 😉

« Petite précision avant de commencer : à Québec, pour un suivi de grossesse, il existe grosso modo deux circuits :

  • Suivi par un médecin et accouchement en milieu hospitalier 
  • Suivi par une sage-femme en externe et accouchement dans une maison de naissance (qui n’a aucun lien avec l’hôpital, pas de médecins ou d’infirmières)

Pour les examens, s’il n’y a aucune particularité : deux échographies, deux analyses d’urines et deux prises de sang. Elles ont lieu à la fin du premier et du deuxième trimestre. 

Automne 2020, des amies venaient ou étaient en train de vivre l’expérience d’un suivi en maison de naissance. Que d’éloges et de satisfaction, mais pour autant, en moi, j’étais mal à l’aise de ne pas être suivie médicalement parlant ! J’avais dans mes antécédents une pancréatite fulgurante (merci ma vésicule biliaire d’avoir bouché les canaux) et je me rappelle encore de la tête des médecins en voyant mes analyses sanguines. J’avais explosé le record du service…!

Avec cette expérience, j’avais de l’appréhension concernant le diabète gestationnel ou d’autres complications. J’ai donc décidé d’être suivie par une médecin et sa collègue infirmière. Toutes les deux ont toujours été à l’écoute et de très bon conseil. 

Dans l’ensemble, ma grossesse s’est plutôt bien déroulée. La première échographie a révélé qu’il y avait eu au début deux embryons mais seule notre futur chouette a continué son développement. Une fois le choc passé, la grossesse s’est bien déroulée. 

34SA : je trouvais que je gonflais pas mal ! Ma dernière prise de sang, à la fin du deuxième trimestre, était normale. La médecin qui me suivait a également constaté que j’avais gonflé mais comme je n’avais aucuns signes inquiétants (ex : hypertension, migraines, mouches devant les yeux, douleurs au ventre…), on ne s’est pas inquiétées. Elle m’a cependant répété au moins 100 fois les fameux symptômes de la pré-éclampsie pour bien que cela rentre dans mon crâne (et elle a eu raison !).

38SA : de bonnes contractions m’ont empêchée de dormir et j’ai eu cette barre au ventre… Exactement la même douleur que lors de ma pancréatite. J’ai vomi en plein milieu de la nuit, direction l’hôpital ! Là-bas, une infirmière d’une douceur incroyable nous a accueillis… Elle m’a proposé un bain chaud, j’y suis restée deux heures, avec mon conjoint qui me surveillait. Que j’étais bien ! Les contractions et la douleur au ventre ont disparu ! Une médecin a vérifié plusieurs fois ma tension : entre 12 et 13. Elle m’a demandé si je n’avais pas de flashs lumineux, de migraines…  Non je n’avais rien de tout cela ! On m’a laissée rentrer à la maison.

38SA+4 : je n’étais vraiment pas en forme. Nauséeuse, pas d’appétit, je ne faisais que boire de l’eau et j’ai constaté que j’urinais beaucoup moins. Après un trajet en voiture, j’ai eu des contractions très fortes et la douleur au ventre est revenue. À la maison, j’ai vomi à nouveau. Les paroles de ma médecin sur la pré-éclampsie me sont revenues en tête. Alors j’ai demandé à mon conjoint de prendre ma tension. Elle était à 15 ! Direction l’hôpital !

Au début, l’infirmière d’accueil n’était pas spécialement stressée par ma situation. L’ambiance était très électrique entre nous deux ! Agacée par sa nonchalance, j’ai fini par lui dire sèchement : « Je bois 2 à 3 litres d’eau par jour et je n’urine presque plus ! ». Son regard a directement changé et c’est là que la valse a commencé.

Prise de sang (après une dizaine d’essais car je suis devenue « impiquable »), tension prise toutes les 10min, visites de trois médecins de services différents (médecin de garde, service obstétrique, service médecine interne). Le résident (équivalent de l’interne en France) de la médecine interne a commencé à me donner son hypothèse : « Vous faites probablement une pré-eclampsie et… ». L’infirmière avec qui j’avais mené la guerre froide une heure plus tôt a débarqué paniquée dans la salle en agitant un bout de papier : « 25 000 !!!!! Son taux de plaquettes est à 25 000 !!! » Là, le résident m’a regardé droit dans les yeux : « Vous FAITES une pré-éclampsie et un HELLP syndrome très grave ».

Je n’ai pas paniqué, je connaissais déjà ce syndrome (une de mes proches avait traversé cette épreuve). Je suis directement rentrée en mode guerrière qui allait se battre avec toute son armée (ici mon conjoint, ma future chouette, les infirmières et les médecins). Je me rappelle que j’avais eu l’impression d’être pleinement actrice dans cette situation où je n’avais aucun vrai contrôle. J’avais écouté très attentivement le plan de match, comme pour dire à mon corps d’en prendre de la graine ! Plaquettes à 30 000 minimum pour un accouchement voie basse, à 50 000 minimum pour une césarienne. Pour ce combat, avec l’appui de mon conjoint, on m’a installée dans une grande salle de travail. Deux infirmières sont restées collées à mon lit H24 (l’une pour surveiller mon état, l’autre pour surveiller le monitoring de la future chouette). Vingt minutes de présence obligatoire d’un médecin par heure. Toute la fourmilière était agitée car mes plaquettes ont encore chuté (16 000). J’ai accepté de recevoir les hormones pour accélérer le travail, avec interdiction de la part de l’anesthésiste de me faire l’épidurale (☹ je la voulais moiiiiii).

Une fois toute l’agitation de l’installation terminée, l’ambiance a radicalement changé. Calme, sérénité, et moi qui absorbais tout l’oxygène de la pièce pour canaliser la douleur des contractions ahah ! J’étais devenue la pro de la respiration 😉! Entre deux contractions, je prenais le temps de parler avec mon conjoint et les infirmières, et souvent, je leur demandais comment ils allaient, EUX. J’avais cette conviction que tout finirait bien pour moi alors j’étais plutôt axée sur leur confort. Plus tard, j’ai appris que mon comportement calme et le fait que j’avais toujours un petit mot pour l’équipe, les a énormément touchés. 

Dans cette journée difficile, on a même eu des moments drôles, comme quand mon infirmière préférée m’a proposée de la glace pour une petite collation. J’ai directement dit oui et quand elle est revenue avec des glaçons, j’ai explosé de rire !

Dans la nuit, après 10h de travail, une belle nouvelle est arrivée ! Mes plaquettes étaient remontées à 80 000. On a continué la transfusion et, la solution de la césarienne est de nouveau devenue accessible. Dernier débriefing avec l’équipe, mon conjoint et moi-même : on a opté pour cette solution. Je sentais que mon corps n’arriverait pas à tenir plus longtemps, je commençais à trembler de tout mon corps à chaque fois qu’on me manipulait. Et ma tension s’affolait de plus en plus à chaque contraction. 

2h00 du matin, on m’a emmenée vers la salle. Mon conjoint m’a tenu la main jusqu’où cela lui était permis. Puis c’est mon infirmière préférée qui a pris le relais en me serrant doucement la main, comme une maman. J’ai pris le temps de faire une dernière blague avec l’équipe puis dodo pour moi ! 

À mon réveil, mon infirmière préférée était encore là, elle m’a expliqué tout ce qui s’est passé. Tout d’abord, notre fille est née en bonne santé. J’ai appris que j’ai fait une grosse hémorragie et qu’on m’a à nouveau transfusée. Je me sentais un peu dans les vapes : dès que je commençais à réfléchir, j’avais comme des chatouillis à l’intérieur de mon crâne. Plus tard, le chef des soins intensifs (équivalent de la réanimation en France) m’a expliqué que c’était en lien avec la transfusion. 

Ce séjour de 48h a été le moins bon souvenir mais heureusement mon conjoint a été autorisé à rester tout le temps avec moi ! Malgré le contexte Covid, le chef de service a autorisé sa présence, et le must du must, l’équipe de la pouponnière a emmené ma chouette dans ma chambre durant une heure… Quel bonheur !

Je n’ai certainement pas la photo la plus instagramable de notre première rencontre (on s’entend qu’avoir le teint gris, être perfusée de partout, des lunettes à oxygène, gonflée comme un ballon de baudruche, des hématomes partout, c’est pas glamour) et pourtant, je l’aime cette photo qui symbolise la force de notre famille !

La suite ? Après 48h en soins intensifs, j’ai été transférée en maternité où je suis restée 30h ! L’équipe médicale était étonnée que je récupère aussi vite ! Bye bye les protéines, tension devenue raisonnable et bonjour les jolies plaquettes toutes neuves ! J’étais très fatiguée mais heureuse de pouvoir être avec ma famille 😊

Je ne remercierai jamais assez l’équipe de l’hôpital qui a su nous porter (alors qu’ils étaient également très stressés). Concernant la pré-éclampsie et le HELLP syndrome, j’ai eu la chance que mon corps tienne jusqu’à la fin de la grossesse ! J’insiste sur le fait qu’on peut décompenser d’un coup et qu’il faut rester vigilante ! Vraiment, si vous sentez que quelque chose cloche, allez consulter ! »

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